Argent
Pendant longtemps, il était celui qui s’occupait du financement d’Hydro-Québec ou d’autres sociétés publiques québécoises à Wall Street. Il a donc conseillé le gouvernement sur ses finances et pavé la voie à l’émission d’obligations. En entrevue à Argent, le banquier du Québec Richard Schmeelk ne se montre pas inquiet pour la province qui devra toutefois surveiller sa dette.
A travers ces années, M. Schmeelk a donc connu ses voisins du Nord et ses institutions. Selon lui, les nombreuses ressources présentes ici font en sorte que le Québec est bien placé sur l’échiquier mondial. L’avenir est donc brillant mais il faut faire gaffe aux dépenses publiques.
«Vous avez de ressources massives, l’hydroélectricité, du gaz, etc. Vous êtes une province riche et c’est une donnée importante. Un problème vous menace toutefois – comme d’autres pays – c’est qu’il vous faudra payer toutes ces pensions aux retraités. Cela va coûter énormément à la société surtout lorsque les services publics sont aussi importants», a-t-il estimé.
Selon lui, le Québec doit s’appliquer à contrôler sa dette et à investir en éducation. «Il y a beaucoup trop de décrocheurs en Amérique, c’est un véritable problème. On doit s’attaquer à ce problème», affirme-t-il.
Durant ces années où il était associé à Salomon Brothers, la banque d’investissement américaine, il faisait affaires avec certains des emprunteurs les plus importants de la planète : l’Ontario, le Québec, AT&T ou la Banque mondiale. Et il en garde un bon souvenir.
«Je dois dire que les Québécois sont les gens les plus professionnels avec lesquels nous faisions des affaires. Ils venaient à New York, ils connaissaient leur métier», affirme-t-il en se rappelant ses nombreuses relations avec le Québec et le Canada.
Le PQ et Wall Street
M. Schmeelk se remémore notamment ses contacts avec le gouvernement péquiste de René Lévesque qui bousculait l’ordre établi. Il se rappelle notamment de son premier repas avec le ministre des Finances d’alors Jacques Parizeau qui soignait ses relations avec Wall Street pour se montrer irréprochable en vue d’accéder à la souveraineté.
«Lorsque le gouvernement de René Lévesque est arrivé au pouvoir, M. Parizeau est venu à New York. Nous avons mangé ensemble et il nous avait expliqué qu’il aimait la Révolution américaine. Je crois que nous Américains, nous aimions un voisin comme le Québec qui ne brassait pas trop la cage et qui était tranquille. Nous aimions le Canada comme il était. Mais nous avions écouté M. Parizeau avec beaucoup d’attention», relate M. Schmeelk.
Mais selon lui, Wall Street n’était pas réfractaire à l’arrivée d’un gouvernement péquiste mais le Québec devait faire ses devoirs.
«René Lévesque est venu une fois et il m’a dit : je crois que vous êtes nerveux à propos de notre gouvernement. Et je lui ai dit : non, mais c’est vraiment à vous de montrer que vos politiques ne vont pas avoir un poids trop énorme sur votre dette. J’ai toujours dit : nous représentons les gens et non pas des partis politiques. Nous avons donc donné nos meilleurs conseils au gouvernement», affirme-t-il.
Les bonis de Wall Street
Sur les salaires des banquiers de Wall Street qui seront à un niveau historique, M. Schmeelk se montre critique mais affirme que plusieurs doivent partager la responsabilité de la débâcle économique des dernières années.
«C’est surprenant et décevant qu’ils s’accordent encore toutes ces primes. Mais il faut se rappeler ce qui s’est passé avec la crise. Le gouvernement américain est aussi fautif : il a mis en place un système dans lequel tout le monde pouvait accéder à la propriété même ceux qui n’en avaient pas les moyens», a-t-il estimé.
«La Réserve fédérale américaine a aussi conservé son taux directeur trop bas trop longtemps. Cela n’a pas aidé. Et après tout s’est écroulé, les banques ont été balayées, les gens ont perdu leur maison. Puis Freddie Mac et Fannie Mae (sociétés de refinancement hypothécaires) ont tombé à leur tour. Mais ce n’est pas seulement la faute de Wall Street. La responsabilité est partagée», croit l’ancien dirigeant.
Une bourse pour le bilinguisme
M. Schmeelk était de passage à Montréal afin de souligner le 25e anniversaire de sa fondation qui subventionne les études universitaires de Canadiens qui désirent poursuivre leurs études dans la langue officielle qui n’est pas leur langue maternelle.
Cette bourse remet aux récipiendaires différents bourses à des étudiants universitaires de 2e et 3e cycle. Depuis sa création, environ 80 personnes ont bénéficié de cette fondation.