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«Accepter une situation comme la nôtre, c'est long»

Suicide assisté d'un polyhandicapé

Les réactions sont nombreuses au lendemain de la confirmation par la mère de David Audesse que son fils, amputé des bras et des jambes, a bel et bien eu recours au suicide assisté.

Les membres de David ont dû lui être retirés à la suite d'une septicémie, une grave infection du sang. Un choc terrible. Le jeune homme n'a jamais pu accepter sa nouvelle condition, qui le rendait extrêmement dépendant pour toutes les activités du quotidien.

Jacques Théberge, lui, est polyhandicapé de naissance. Il vit une existence particulière depuis toujours. Privé de bras, doté de petites jambes, il ne peut se servir que de son pied gauche.

M. Théberge s'est confié à Mario Dumont et Harold Gagné. Il pense que David Audesse a peut-être manqué de support et d'encadrement pour pouvoir prendre conscience qu'il y a un flot de possibilités, même en étant polyhandicapé.

La vague de messages de compassion publiés sur la page Facebook de LCN par rapport au geste posé par le jeune homme fait réagir M. Théberge. «Je n'ai que de la compassion pour cet homme. Mais il y a une forme d'acceptance dans les commentaires, comme si c'était tout à fait normal de vouloir mettre fin à ses jours et d'être malheureux lorsqu'on a un handicap, déplore-t-il. Moi-même, étant venu au monde avec un handicap, j'ai connu dès le départ le fait que mes parents n'ont pas accepté mon handicap. Ils ont même choisi de m'abandonner à la naissance, mentionne-t-il. Ça aurait été quoi là, quand on parle de suicide assisté, le résultat de ma vie? Jusqu'où j'aurais pu poursuivre si on avait légalisé ce genre de chose-là comme on discute de la légalité de l'avortement par exemple?», questionne-t-il.

«J'ai deux enfants, de 14 et 11 ans. Je pense que la vie, dans le fond, c'est de miser sur ce qu'on a, et pas ce qui nous manque», mentionne M. Théberge.

Un très long deuil

Jacques Théberge vit un sentiment de dépendance chaque jour, ayant besoin d'aide pour accomplir plusieurs tâches. Il conçoit donc très bien que le deuil de David Audesse ait été très difficile à faire.

Celui-ci a mis fin à ses jours un peu plus d'un an après le traumatisme. Un court laps de temps pour s'adapter, croit M. Théberge. «C'est très peu car le cheminement qu'on doit faire pour accepter une situation comme la nôtre, c'est long. Je peux vous dire qu'aujourd'hui, j'ai 44 ans et je travaille encore sur certains aspects.»

Une opinion que partage le psychologue Gilles Vachon. «Le deuil de ça en bas de deux ans, disons que c'est un petit peu tôt pour se refaire une identité avec ce qui reste de ce que j'étais physiquement», explique-t-il.

Pour le psychologue, «ce n'est pas du tout la même chose venir au monde avec un handicap ou subir un choc traumatique, une perte». Il faut beaucoup de temps pour se reconstruire après une si grande épreuve.

«Perdre l'usage d'un membre c'est un deuil, renchérit Jacques Théberge. Quand on perd un être cher, est ce qu'on peut se dire que 12 mois, 14 mois, est un chiffre absolu pour se remettre du décès? C'est un peu la même chose.»

«La question qu'il faut se poser, c'est quel genre de soutien David a reçu de la part du milieu, du réseau?, poursuit-il. Et du côté de son entourage, de son environnement familial, ses proches, quel genre d'outils ces gens-là ont eu? Et est-ce qu'ils en ont d'abord reçus? Étaient-ils adéquats?»

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