La protection des petits investisseurs contre les fraudeurs en cravate a fait un bond de géant depuis l’affaire Norbourg qui avait appauvri des 9 200 investisseurs-épargnants le 25 août 2005 avec des pertes de 95 millions $
Des observateurs du milieu du placement estiment qu’il serait passablement plus difficile de commettre un détournement de fonds comme l’a fait Vincent Lacroix.
« Ça a été le baptême de feu de l’Autorité des marchés financiers (AMF) qui a été mise en cause pour ne pas avoir vu venir la fraude. Ce premier vrai test lui a permis d’établir une manière de procéder », analyse Willie Gagnon, du Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC).
En effet, depuis 10 ans, l’AMF connaît de profonds changements structurels. Ses effectifs ont augmenté de 300 %, passant de 47 à 160 inspecteurs et enquêteurs, dont un bon nombre travaille avec des analystes, des procureurs et des spécialistes qui font du cyber surveillance. Ces équipes détectent sur le web les annonces de prétendus conseillers et investisseurs sans scrupules.
« Depuis 2010, ces changements ont permis de générer 400 dossiers de mises en garde, d’avis à la population et de nous placer en avant de la parade, avant que le mal soit fait », déclare le porte-parole de l’AMF, Sylvain Théberge.
De plus, à compter du 15 juillet 2016, de nouvelles conditions de divulgation d’informations seront obligatoires pour les conseillers. Le Modèle de relation client-conseiller - Phase 2 (MRCC2) est conçu pour fournir aux investisseurs de l’information sur le travail de leur conseiller. Par exemple, il leur permettra d’en apprendre sur la performance que leurs placements ont réalisée pendant diverses périodes de mesure normalisées.
« C’est une énorme révolution concernant les communications entre le financier et l’investisseur. Ça engendrera beaucoup plus de transparence, dont la divulgation des frais annuellement. L’investisseur saura combien la gestion [de son portefeuille] coûtera », ajoute Vincent Cliche, conseiller en placement à la Financière Banque Nationale.
Plus de collaboration
Sans attribuer ces changements aux scandales Norbourg ou Earl Jones, les observateurs du milieu estiment qu’ils ont favorisé une meilleure collaboration avec les corps policiers.
Divers protocoles, inexistants il y a dix ans, permettent des échanges d’informations entre l’AMF et la police, favorisant le développement d’une expertise en criminalité financière.
« Nous avons réalisé que ces échanges sont vitaux. Ils permettent d’infiltrer et de repérer les stratégies des fraudeurs » estime Sylvain Théberge.
Une législation rehaussée
La sensibilité de la population et des petits investisseurs sur les conséquences des crimes économiques ont poussé les législateurs à rehausser les outils de contrôle et les pénalités. Mais, du travail reste à faire.
« Les gens doivent encore être éduqués sur les affaires de base, même si la tendance est qu’ils sont plus conscientisés et qu’un véritable mur de Chine est érigé dans les grandes firmes, pour tout contrôler », poursuit Vincent Cliche.