Après avoir navigué dans les cercles économiques privés et tâté le pouls de l’appareil gouvernemental, Jean-Martin Aussant s’attelle à un tout autre chantier, celui de l’entreprenariat collectif.
Se disant mûr pour devenir l’un des acteurs du développement économique, le nouveau directeur général du Chantier de l’économie sociale souhaite s’investir dans l’objectif de réinventer l’écosystème de l’entrepreneuriat, ce qui passe par plus de concertation entre les régions et une plus grande promotion de l’économie sociale.
L’œil vif, Jean-Martin Aussant s’est dit convaincu que l’économie sociale doit occuper une place grandissante au Québec, sans écarter le privé ou l’investissement gouvernemental.
«Il ne faut pas tout remettre au privé, ni tout au gouvernement, ni tout au collectif, il faut chercher un équilibre. Ce sont les trois piliers de l’économie», a affirmé M. Aussant.
Avec moins de deux semaines dans ses nouvelles fonctions, le directeur assimile une masse considérable d’informations issues d’un vaste terrain de jeu et il se fait déjà le défenseur de cette manière de développer l’économie.
«Ce n’est pas de la charité l’économie sociale, mais un développement rentable, qui crée des emplois et qui représente près de 40 milliards $ dans l’économie du Québec. Et si un projet est rentable, qu’il fonctionne bien, qu’il répond au besoin d’une collectivité, on ne va pas le déménager en Amérique latine ou en Asie pour réaliser un pourcentage de rendement supplémentaire», a-t-il argumenté.
Après une carrière où se sont succédé des mandats de gestionnaire de portefeuille, de consultant en finance quantitative, de vice-président de Morgan Stanley, la venue de Jean-Martin Aussant, également ancien député du Parti québécois et fondateur d’Option nationale, peut faire sourciller.
«Je ne renie pas mes idées du passé, mais je suis vraiment engagé sur le plan de la société civile et j’avais vraiment envie d’explorer le pilier collectif qui place la population avant le profit. Je fais aujourd’hui de la politique publique et non pas de la politique partisane», a résumé M. Aussant avec assurance, insistant pour dire qu’il n’empruntait pas une voie de passage.
Une décision mûrie
«Je voulais élever mes enfants moi-même, ce qui est incompatible avec la politique active qui représente 80 heures par semaine. Ce n’est pas la nuit qu’on élève un enfant».
S’il n’écarte pas un éventuel retour, ce ne sera pas avant plusieurs années, a-t-il maintenu. «Si j’y reviens, ce n’est pas dans le court terme et certainement pas pour 2018.»
À court terme, Jean-Martin Aussant a clairement identifié ses cibles d’action prioritaires, dont une tournée des régions pour rencontrer les partenaires régionaux, se rendre, si possible, dans les campus universitaires ou collégiaux afin d’insuffler le désir d’entreprendre chez les jeunes et les amener à considérer l’avenue de l’entrepreneuriat collectif comme une manière d’y parvenir.
«Avec la crise de 2008, ce qui était collectif a mieux survécu à la crise que ce qui était privé. Il faut dire que lorsqu’une collectivité pense à un projet, et qu’elle s’y investit, elle pense à long terme», a expliqué le nouveau directeur.
En septembre, Jean-Martin Aussant se présentera aussi devant la Commission des finances publiques de l’Assemblée nationale afin de discuter de fiscalité. Il entend suggérer des pistes qui pourraient notamment aider les entreprises à considérer de transformer, dans un contexte de relève entrepreneuriale, une entreprise privée en entreprise collective. Une formule qui pourrait s’accompagner de mesures fiscales incitatives.
«L’économie collective du Québec sert de modèle dans le monde, mais la plupart des gens n’en sont pas conscients», a constaté M. Aussant.
Un éventail de secteurs sont pourtant investis par l’économie sociale tant dans l’éducation, avec les CPE, que dans les soins pour les aînés ou la culture avec la TOHU et plusieurs festivals au Québec. On peut aussi penser aux géants du milieu coopératif que sont Desjardins et la COOP fédérée.
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Secteurs d’activités diversifiés
Nombre d’entreprises: Plus de 7000
Emplois: Plus de 150 000
Revenus: Environ 40 milliards $ du PIB du Québec