L'ancien premier ministre libéral Jean Chrétien a plongé dans l'arène électorale samedi en dénonçant vigoureusement la politique étrangère du Canada de Stephen Harper, allant jusqu'à dire que le premier ministre lui faisait «honte».
Dans une lettre ouverte publiée dans plusieurs quotidiens du pays, Jean Chrétien affirme que «le détachement» du premier ministre conservateur devant la crise des migrants syriens «fait honte aux Canadiens et à notre pays aux yeux de la communauté internationale».
Dans sa lettre, Jean Chrétien fait un rappel détaillé de plusieurs décisions en matière de diplomatie des gouvernements qui se sont succédé à Ottawa depuis sept décennies, dont l'appui à la lutte de Nelson Mandela contre l'apartheid en Afrique du Sud par le premier ministre progressiste-conservateur Brian Mulroney et son propre refus de s'engager dans la guerre contre l'Irak en 2003, parce l'ONU avait refusé de donner son consentement à une intervention militaire.
M. Chrétien, qui fut premier ministre de 1993 à 2003, souligne aussi le rôle de l'ancien premier ministre Lester B. Pearson qui, alors qu'il était ministre des Affaires extérieures, avait contribué à mettre un terme à la crise de Suez en proposant la création d'une force de paix par l'ONU, marquant la naissance des Casques bleus.
Selon M. Chrétien, Stephen Harper a terni en moins d'une décennie «près de 60 ans de notre réputation de bâtisseurs de paix et porteur de progrès».
Il fait notamment état dans sa lettre de l'envoi de CF-18 canadiens pour combattre le régime Kadhafi en Libye en 2011, ainsi que l'implication militaire actuelle en Irak et en Syrie contre le groupe armé État islamique.
«Après la campagne de Libye dont on sait maintenant les conséquences désastreuses, le gouvernement Harper a fait survoler le parlement par nos chasseurs-bombardiers en signe de victoire ; un rituel normalement caractéristique de nations conquérantes et guerrières», a entre autres dénoncé l'ancien premier ministre libéral.
«Aujourd'hui, en tant que Canadien, c'est avec un mélange de honte et de tristesse que j'observe la réaction froide et dure de notre premier ministre devant la tragédie des réfugiés en provenance de la Syrie et de l'Irak. Entre-temps, la chancelière allemande Angela Merkel s'est montrée à la hauteur de drame et le monde regarde la générosité de son pays avec la plus grande admiration. La même chose vaut notamment pour la Norvège, la Suède et la Finlande», a indiqué Jean Chrétien.
«Mais qu'est donc devenu le Canada, nation avancée et progressiste, facteur de paix et de stabilité dans le monde ?», se demande M. Chrétien, qui fera d'ailleurs campagne avec Justin Trudeau, dimanche, à Hamilton, en Ontario.
Paradis défend Harper
Le ministre sortant du Développement international, Christian Paradis, a pris la défense de Stephen Harper et a répliqué en indiquant que le premier ministre «a été très proactif» concernant la crise des réfugiés syriens, qui a commencé en 2011.
«Depuis le début de la crise que nous sommes très actifs. Nous sommes parmi les premiers en termes de donateurs. Quand on parle de réinstallation de réfugiés, nous sommes en tête de liste», a tenu à signaler M. Paradis.
Le ministre Paradis s'est d'ailleurs questionné sur la rencontre qu'a eue Jean Chrétien avec le président de la Russie, Vladimir Poutine, au mois d'avril dernier.
«Beaucoup de gens ont sourcillé et m'ont demandé : "Qu'est-ce qu'il fait avec Poutine. C'est lui qui a envahi l'Ukraine, qui soutient le régime de Bachar al-Assad". Donc, on peut diverger d'opinions», a réagi M. Paradis.
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