Le premier ministre conservateur sortant Stephen Harper a dû batailler ferme jeudi lors d'un débat électoral pour défendre son bilan économique, marqué par deux récessions, face à ses adversaires prompts à le lui rappeler et préférant parler environnement et immigration.
Debout derrière leur pupitre, tous vêtus d'un costume sombre, trois hommes aspirent au même but: diriger le Canada après les élections législatives du 19 octobre.
Le sortant Stephen Harper --trois mandats et neuf ans au pouvoir-- a le plus souvent été sur la défensive face à Thomas Mulcair, leader du Nouveau parti démocratique (NPD, gauche), et Justin Trudeau, chef du parti libéral (centre).
Les trois sont au coude à coude dans les derniers sondages et l'un d'eux va hériter d'une économie plombée par la chute des cours du pétrole depuis plus d'un an.
«M. Harper a mis tous ses oeufs dans le même panier, et il a laissé tomber son panier», a ironisé M. Mulcair en référence à un choix délibéré d'une activité largement basée sur le pétrole.

(Crédit photo: Reuters)
C'est d'ailleurs à Calgary, au coeur de la province de l'Alberta (Ouest) et des champs pétroliers des sables bitumineux, que le débat était organisé.
Avec un baril tombé sous les 50 dollars, l'économie canadienne a sombré en récession au premier semestre tant le secteur énergétique pèse sur l'activité (10% du PIB).
Malgré ce trou d'air pour le Canada, seul pays du G7 à être en récession, le gouvernement conservateur a pu dégager un léger excédent budgétaire sur l'exercice fiscal 2014/15 pour la première fois depuis la précédente récession il y a six ans.
Stephen Harper s'en est félicité, car, selon lui, le meilleur moyen «de protéger notre économie est de s'assurer que notre budget est équilibré».
Souvent pugnace, même en restant trop centré sur son message sans vraiment débattre, Justin Trudeau a fustigé le bilan du chef du gouvernement sortant. «M. Harper n'a pas seulement le pire bilan en terme de créations d'emplois depuis la Seconde Guerre mondiale, il a aussi le pire record pour la croissance depuis la grande dépression» des années 30.
Puis le débat a glissé sur l'emploi et l'immigration économique, l'occasion d'une première escarmouche.
«Les Canadiens veulent un premier ministre qui comprenne le sens de l'urgence que nous ressentons tous» face à la crise des réfugiés syriens, a lancé M. Mulcair.
«Malheureusement, et c'est indigne, (Harper) est alarmiste» en faisant croire que le NPD ou les libéraux veulent «ouvrir les portes aux gens sans aucune attention à la sécurité».
Le NPD a promis, en cas de victoire, d'accueillir 46.000 réfugiés syriens sur quatre ans, les libéraux 25.000 immédiatement, tandis que les conservateurs veulent à la fois régulariser les 10.000 réfugiés assignés par l'ONU cette année puis autant l'an prochain.
«Nous avons besoin d'être à nouveau un pays ouvert et accueillant» et si la notion de sécurité est importante, «n'en prenons pas prétexte pour fermer nos portes», a dit Justin Trudeau.
«Le Canada est un pays d'immigrants», a rappelé Thomas Mulcair en soulignant au passage que son épouse était une immigrante.
L'environnement à l'approche de la conférence de Paris sur le climat (COP21) a aussi été l'occasion de pointer les différences entre les trois candidats alors que la chef du Parti vert, Elizabeth May, n'avait pas été invitée au débat.
Stephen Harper, qui a sorti le Canada du protocole de Kyoto en 2011, a affirmé que son gouvernement investissait déjà «dans les énergies renouvelables» et pas uniquement dans le pétrole.
Pour M. Trudeau, l'environnement n'est pas l'ennemi de la croissance économique et il a promis «20 milliards dans les 10 ans dans des infrastructures plus vertes» afin d'«évoluer vers les énergies renouvelables». De son côté, le NPD défend le principe du pollueur payeur.