Un médecin anesthésiste qui est aussi médecin de guerre et qui habite juste à côté d'un des bistros mitraillés vendredi soir est intervenu auprès des victimes alors que ça tirait encore dans le quartier. Le Dr Michel Bonneau a raconté à TVA Nouvelles les moments qu'il a vécus.
«Je travaillais sur mon ordinateur, j'ai entendu le staccato des armes automatiques. Là, il y avait eu une rafale, il y avait quatre corps, là, dans le coin, là. Il y avait deux hommes», raconte-t-il.
Après avoir annoncé qu'il était médecin, on lui a montré les victimes. «Les gens m'ont pris pour m'emmener de corps en corps, donc j'ai dit: lui, il est mort; lui aussi. Il y avait deux hommes morts et deux femmes qui étaient en vie. Donc, il y avait une jeune femme allongée. Je n'avais plus de pouls, plus de tension, mais les yeux étaient encore vivants, enfin, voilà, les yeux... Donc, quelqu'un m'a dit qu'il était "first aid". Donc, je lui ai demandé de commencer le massage et moi, j'ai fait le bouche-à-bouche. On l'a perdue, la fille est morte. J'ai fermé ses yeux, on a arrêté».
Comme l'endroit n'était pas sécurisé, on leur a demandé d'entrer dans un restaurant.
«On a attiré les blessés et les morts à quatre pattes à l'intérieur du restaurant. La petite qui est morte, c'est une petite Américaine. Je l'ai reconnue le lendemain. Elle s'appelle Noemi Gonzalez, elle était d'origine mexicaine, elle habitait à Los Angeles. Elle était là pour un échange avec une école de design. Et l'autre dame, elle est morte; à l'intérieur, l'autre dame est devenue inconsciente. Elle avait une blessure très grave à l'abdomen, une jambe sectionnée. J'ai essayé de la réanimer, donc elle est morte aussi», dit-il.
Malgré tous ses efforts, le médecin a perdu plusieurs patients ce soir-là.
«C'est ce sentiment d'impuissance, de ne pas pouvoir sauver ces blessés, quoi. J'aurais voulu avoir une ambulance de SAMU, il n'y en avait pas, elles étaient prises ailleurs. Est-ce qu'on aurait pu faire mieux? À l'intérieur, il y avait plusieurs blessés, des membres, des balles dans les bras. Là, les sapeurs pompiers ont mis des garrots, c'était très utile. Il y a un monsieur qu'on croyait mort, qui était blessé gravement et qu'on a pu évacuer.»
«Voilà, mais bon! C'est un véritable défi! Allez au secours, je suis anesthésiste, donc je suis concerné, voilà! Il faut qu'on revoie nos dispositifs, qu'on revoie l'équipement des ambulances des sapeurs pompiers, c'est un véritable défi. Avec des actes de guerre, des blessés de guerre, on ne rigole plus! Il faut qu'on prépare la prochaine fois. J'espère qu'elle n'arrivera pas, mais on doit se préparer à ça», conclut-il.