Ce sont environ 2 000 véhicules qui ont été escortés vendredi par la police pour permettre aux sinistrés pris au piège des feux de forêt au nord de Fort McMurray de s'échapper vers le sud en découvrant des quartiers ravagés où, pour certains évacués, leur habitation n'est plus que cendres.
Une vaste opération a été mise sur pied pour sortir les milliers de réfugiées toujours dans des bases de vie des compagnies pétrolières à 30 ou 40 km au nord de la ville canadienne dont le centre est pratiquement intact, mais où des secteurs résidentiels aux abords sont largement en ruines.
«Le centre-ville est en grande partie intact, le central téléphonique également, l'hôpital est toujours debout et la station d'épuration a été remise en état», a assuré vendredi Rachel Notley, première ministre de l'Alberta en notant que l'aéroport, au sud-est de la ville, était également épargné.
Sans minimiser l'étendue des dommages, Mme Notley a aussitôt nuancé: «nous avons vu, le cœur serré, les photos prises par les habitants qui ont traversé Fort McMurray (...) et cela ne fait aucun doute que les dégâts sont étendus» avec «des mois pour reconstruire».
À l'arrivée des convois à Wandering River à 200 km au sud, les habitants ont en effet décrit des scènes terrifiantes. Margarita Carnicero a raconté à l'AFP avoir vu des décombres « noircis et fumants » ne reconnaissant pas une ville d'habitude animée.
Jane Stevens ne sait pas si sa maison est encore debout, car, escorté par un groupe de 50 véhicules, les automobilistes devaient rester sur l'autoroute 63 qui traverse Fort McMurray à l'ouest. Elle a cependant trouvé un peu de réconfort en apprenant que la pétrolière Shell, employeur de son mari Rick, lui avait assuré sa réembauche.
Sur le front des incendies, la situation restait critique et les flammes ont ravagé maintenant un peu plus de 101 000 hectares, a indiqué Chad Morrisson, directeur du service des incendies de l'Alberta, une superficie équivalente à dix fois celle de Paris.
«Le feu continue de brûler sans aucun contrôle», mais en se déplaçant vers le nord-est, soit vers la forêt boréale où il n'y a plus aucun habitat, s'est rassurée Mme Notley.
Les importants moyens déployés sur le terrain ne permettent pas de circonscrire les incendies, mais simplement de protéger des bâtiments ou des infrastructures vitales, ont reconnu les responsables.
«Actuellement, c'est de pluie dont nous avons absolument besoin», a expliqué Chad Morrisson en assurant qu'il faudra «des semaines et des semaines avant de pouvoir éteindre ces feux».
Les autorités ont lancé de nouveaux appels aux sinistrés afin d'effectuer un recensement précis des besoins. Mais avant toute chose «le logement sera un enjeu majeur», a estimé vendredi soir Don Iveson, le maire d'Edmonton, la capitale de l'Alberta qui a équipé des centres d'hébergement où 4 400 lits attendent une partie des sinistrés du nord de Fort McMurray.
La première ministre albertaine a réaffirmé qu'aucun retour des habitants n'est à envisager avant «un bon bout de temps».
Pour subvenir aux besoins de premières urgences pour les évacués, souvent partis en toute hâte sans toujours avoir eu le temps de boucler une valise, le gouvernement provincial a promis une aide immédiate avec un budget de 100 millions de dollars canadiens (68 millions d'euros).
«Nous donnerons 1 250 dollars par adulte et 500 dollars par personne à charge (...) et les fonds seront versés avant mercredi prochain», a assuré Rachel Notley.
Quatre jours après les premiers avis d'évacuation à Fort McMurray, et avec le chaos appelé à durer, l'impact se fait sentir sur la richesse de la province, soit le pétrole.
L'analyste Matt Smith de la société de données ClipperData, «estime à un million de barils par jour le volume de production qui a été retiré du marché». Les compagnies pétrolières ont suspendu ou allégé leur exploitation des sables bitumineux dans la province déjà touchée depuis deux ans par la chute des cours du brut.
Pour les assureurs, la note risque d'être également salée. La Banque de Montréal a déjà estimé la facture à environ 9 milliards de dollars canadiens, un record pour une catastrophe naturelle au Canada.