Une ancienne infirmière a été accusée des meurtres prémédités de huit personnes âgées hébergées dans des centres de soins du sud-ouest de l’Ontario. Les victimes auraient été tuées au moyen «d’un médicament».
Elizabeth Tracey Mae Wettlaufer, qui a perdu sa licence d’infirmière le mois dernier, a comparu mardi devant la Cour de justice de l’Ontario et restera détenue pendant les procédures judiciaires. Les crimes auraient été commis entre 2007 et 2014 à Woodstock et à London.
Dans une conférence de presse courue, la Police provinciale de l’Ontario a révélé que l’enquête s’est amorcée au début du mois de septembre dernier. «Un médicament a été administré aux victimes. Nous ne sommes pas en position de révéler, pour l’instant, de quelle substance il s’agissait», a précisé le surintendant-détective Dave Truax, de la Police provinciale de l’Ontario, devant les médias.
Le policier s’est montré avare de détails, soutenant que ces éléments faisaient partie de la preuve qui sera étalée devant le tribunal. Il a néanmoins ajouté que dans ce type d’établissement de soins, une quantité considérable de médicaments est gardée et accessible au personnel.
Aucune hypothèse n’a été avancée par les enquêteurs sur les motivations de l’ancienne infirmière. Un journaliste s’est risqué à demander s’il pouvait s’agir d’une assistance en vue de pratiquer l’euthanasie.
«Je ne peux pas commenter», a répondu brièvement le surintendant-détective.
Les victimes de l’infirmière, hommes et femmes, étaient âgées de 75 à 96 ans. Le premier décès identifié a été celui de James Silcox, 84 ans, mort le 17 août 2007 et le plus récent était celui de Arpad Horvath, 75 ans, mort le 31 août 2014.
Sept des huit victimes sont mortes au Caressant Care Long Term Care Home à Woodstock, alors que la huitième victime habitait dans le centre Meadow Park de London.
Sa page Facebook donne des frissons
La page Facebook de l’ancienne infirmière Elizabeth Tracey Mae Wettlaufer, accusée mardi des meurtres prémédités de huit aînés, donne froid dans le dos.
Elle y a partagé des photos et des commentaires qui prennent une tout autre signification avec son arrestation.
En juin dernier, «Bethe» Wettlaufer, comme l’ex-infirmière s’identifie sur Facebook, a publié une photo d’elle avec son père âgé.
«La fête des Pères est une bonne façon de me rappeler combien je suis bénie d’avoir mon père encore vivant et capable de passer du temps avec moi.»
Dans une autre publication, en février dernier, l’accusée de 49 ans a partagé la photo d’un t-shirt portant ce message: «Infirmières: nous ne pouvons pas régler la stupidité, mais nous pouvons l’endormir».
Cette publication est particulièrement surprenante, puisque les victimes ont été tuées après avoir reçu un médicament.
Dans un autre message, «Bethe» lance une déclaration pour le moins énigmatique, sans fournir plus d’explication: «Vous ne voyez jamais combien les choses sont toxiques tant que vous ne prenez pas une bouffée d’air frais».
Quelques messages plus loin, elle se plaint d’une soirée particulière difficile avec ses patients dans une résidence de Brantford où, toutefois, aucun décès suspect n’a été découvert.
«Vingt-trois patients avec la gastro (...) mettent tout en place pour une dernière folle nuit. Et cela est un euphémisme!!!!!!»
Le 28 septembre 2015, l’infirmière révèle qu’elle tente toujours de se relever d’une dépendance à l’alcool. «Ma propre voix m’a appelée dans la noirceur, des mains m’ont prise et j’ai choisi la lumière, un an avant aujourd’hui, je me suis réveillée non morte, 365 jours de sobriété.»
La fille d’une des victimes avait des doutes
La fille de la dernière victime alléguée connue de l’ancienne infirmière Elizabeth Tracey Mae Wettlaufer s’est confiée au micro d’une station de radio de London, mardi, immédiatement après le dépôt des huit accusations de meurtres prémédités.
Susan est la fille d’Arpad Horvath, l’homme de 75 ans qui était un résident de l’établissement de soins Meadow Park. Il est décédé le 31 août 2014.
«J’avais une intuition depuis le début que quelque chose n’allait pas», a-t-elle confié la voix traversée par des sanglots. «Il était de plus en plus maigre, je me disais que quelque chose n’allait pas», a dit Mme Horvath à l’émission «Craig Needles Show».
Son père était originaire de la Hongrie et avait immigré au Canada où il a travaillé comme ingénieur à London.
Susan Horvath, la voix brisée, a lancé une question dans son intervention: «Où vais-je aller quand je serais vieille ? Je ne veux pas aller dans ce genre de résidences. Combien d’autres victimes n’ont pas été détectées ?»
Elle n’a pas voulu donner trop de détails sur l’enquête afin de laisser les policiers faire leur travail. Elle a d’ailleurs insisté sur l’attention qu’ils apportaient au dossier et combien ils étaient respectueux et attentionnés.
Elle a terminé l’entrevue avec un conseil pour les auditeurs. «Nous faisons tellement confiance au système. (...) Écoutez toutefois votre intuition, vérifiez par vous-mêmes. Si vous sentez qu’il y a quelque chose qui ne va pas, c’est que quelque chose ne va pas.»
Les victimes alléguées de l’ex-infirmière:
- James Silcox, 84 ans, résident du Caressant Care, décédé le 17 août 2007
- Maurice Granat, 84, résident du Caressant Care, décédé le 23 décembre 2007
- Gladys Millard, 87, résidente du Caressant Care, décédée le 14 octobre 2011
- Helen Matheson, 95, résidente du Caressant Care décédée le 27 octobre 2011
- Mary Zurawinski, 96, résidente du Caressant Care décédée le 7 novembre 2011
- Helen Young, 90, résidente du Caressant Care décédée le 14 juillet 2013
- Maureen Pickering 79, résidente du Caressant Care décédée le 28 mars 2014
- Arpad Horvath, 75, resident du centre Meadow Park, London, décédé le 31 août 2014