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Choc post-traumatique: quand la «peur vient s’incruster dans le cerveau»

Les musulmans de Québec sont frappés de plein fouet par l’attentat dans lequel six des leurs ont perdu la vie, hier, au Centre culturel islamique de Québec, abattus lâchement alors qu'ils priaient.

Face à la violence de la tuerie, plusieurs membres de cette communauté auront besoin de soutien pour regagner leur équilibre psychologique ou, à tout le moins, une certaine paix intérieure.

Pour le psychologue Gilles Vachon, il importe de démêler les termes et de ne pas faire du choc post-traumatique, une expression fourre-tout. «Il importe de distinguer le choc post-traumatique du choc qui relève presque de l’angoisse. Parce qu’être musulman à Québec aujourd’hui après un attentat semblable, si vous avez fui votre pays pour être en sécurité au Canada, et bien vous avez une grande brèche dans votre sentiment de sécurité en ce moment», explique-t-il en entrevue à LCN.

«On en met beaucoup sur le dos du choc post-traumatique, mais il faut savoir que la plupart des gens s’en sortent plutôt bien», précise le spécialiste sur le sujet.

Il illustre son propos en évoquant les deux situations fictives suivantes: «Vous êtes en train de prier, vous recevez une balle dans l’épaule, vous tombez dans les pommes et vous vous réveillez à l’hôpital. Versus, vous vous faites tirer dessus à quatre reprises sans être atteint et vous vous faites courir après pendant 10 minutes. Lequel des deux individus aura le plus gros choc post-traumatique?» Si vous avez répondu le deuxième individu, celui qui n’a subi aucune blessure par balle, vous avez la bonne réponse.

Car, au cœur de ce choc qui peut subsister très longtemps après la tragédie, il y a «la peur de mourir qui vient s’incruster dans le cerveau, se souder dans le cœur même du système nerveux», explique Gilles Vachon. «Dans un choc comme celui-là, 80% des gens auront des réminiscences pendant un mois, mais avant de parler d’un choc post-traumatique, on va attendre un mois. Pour 90% des gens, le tout va rentrer dans l’ordre.»

Évidemment, dans les cas de torture, «ça pourrait être pas mal plus long à s’en remettre», reconnaît l’invité de Paul Larocque, à 100% nouvelles.

Le psychologue souligne d’autre part le «chaos monumental» qui existe à son avis au sein des différentes familles de l’islam à l’échelle mondiale.

«On pense par exemple à Zarkaoui, ce Jordanien en Irak - fondateur d’Al-Qaïda dans ce pays -  qui a fait des choses épouvantables. Alors qu’il assassinait des musulmans, on disait de lui que ce n’était pas possible d’être un boucher semblable. Or, on vient de voir ça à Québec, des gens carrément exécutés pendant qu’ils priaient, parce qu’ils étaient musulmans», ajoute M. Vachon.

Amoindrir le choc

Après avoir encaissé le coup, les témoins ou autres victimes indirectes ont besoin de certains gestes qui aident à réduire l’impact d’un éventuel choc post-traumatique. Comme tous ces témoignages de solidarité qui affluent depuis hier soir en soutien aux familles et à la communauté musulmane éplorées.

Le psychologue assure que des paroles sincères ont un effet très bénéfique: «Ça ne ramènera personne, ça n’arrangera pas les choses complètement, mais ça va assurément soulager cette espèce d’angoisse.

«Les gens qui sont victimes de ce genre d’événement là, ça va leur faire un bien immense de savoir que toute la communauté est derrière eux, qu’on les soutient et que non, on ne ressemble pas à ça.»

Selon M. Vachon, le comportement des politiciens a été irréprochable dans les heures suivant l’attentat. «Ils ont témoigné haut et fort: vous êtes chez vous ici, et non, on n’est pas comme ça, on le déplore autant que vous.»

M. Vachon cite notamment l’exemple du maire de Québec, Régis Labeaume, qui a affirmé vouloir se mettre au service de cette communauté-là et en lui offrant tout ce dont elle avait besoin.

«Je ne vois pas ce qu’on pourrait faire d’autre, on ne peut pas empêcher la folie d’avoir sévi hier», conclut-il.

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