L'équipe de «J.E.» a eu accès à un Airbus A330 immobilisé à l'aéroport Montréal-Trudeau sans avoir fait l'objet de fouille. Il s'agit là d'une des failles de sécurité dénoncée par un comité sénatorial en 2007, mais jamais colmatée.
À l'aéroport Montréal-Trudeau, la fouille des employés se fait de manière aléatoire. Une source recrutée par l'équipe de «J.E.» en possession d'une des 14 000 cartes d'accès à la zone réglementée (CIZR) émises pour l'aéroport s'est prêtée au jeu.
Les pilotes, les mécaniciens, les bagagistes et tous les employés des commerces, des cafés, des restaurants de l'aérogare possèdent ce genre de laissez-passer qui n'ouvrent pas cependant toutes les portes de l'aérogare.
Un jeu d'enfant
En caméra cachée, munie d’une carte d’employé, notre source arrive à un point de contrôle. Elle présente sa carte. Et c’est tout. Aucun agent ne vérifie ce que l'employé transporte sur lui, personne ne lui pose de question, pas de détecteur de métal ni d'explosifs.
Le simple passage de la carte CIZR permet à notre source d’accéder à la zone réglementée. En quelques secondes, la source s'est retrouvée à l'intérieur d’un Airbus A330 effectuant des liaisons transatlantiques.
Ce problème est connu des autorités aéroportuaires et, dans l'optique où Aéroport de Montréal craint la radicalisation de certains de ses employés, préoccupe la direction.
«Le problème de la radicalisation d’employés qui ont accès aux avions préoccupe énormément la GRC. La question a même été abordée lors d'une réunion le 16 décembre dernier», raconte une source à Montréal-Trudeau
Cartes temporaires
C'est Transports Canada qui mène l'enquête afin d'accorder la carte d'identité qui permet l'accès, entre autres, aux avions. L'obtention de ce droit d'accès est plutôt complexe et nécessite une enquête de sécurité en bonne et due forme. Elle inclut la divulgation de vos dernières adresses et les noms de vos derniers partenaires de vie.
Actuellement, Transports Canada prend parfois jusqu'à huit mois avant d'émettre les CIZR. C'est pourquoi des centaines d'employés se font donner des cartes d'accès temporaires au terme d'une enquête de sécurité très sommaire.
Problème en Europe
Un problème similaire, mais de plus grande envergure, s'est aussi présenté à Paris
Les autorités ont découvert ces derniers mois un sérieux problème de radicalisation à l'aéroport Charles-de-Gaulle.
Dans la foulée des attentats de Paris, les enquêteurs ont passé en revue le passé des 86 000 employés ayant accès aux zones sensibles. Résultat: 87 cartes d'accès ont été retirées pour cause de radicalisation.
Assez de sécurité?
Jusqu'en 1998, c'est la GRC qui assurait la sécurité au quotidien dans les aéroports canadiens. À cette époque à Montréal, alors que l'aéroport était trois fois moins grand, le nombre de policiers, lui, était plus important qu'aujourd'hui: 15 policiers de la GRC armés, de jour comme de nuit.
Après la privatisation, chaque aéroport est devenu responsable de sa propre sécurité. À Montréal-Trudeau, c'est le SPVM qui est la seule force armée dans l'aérogare.
Il n'y a maintenant que six agents armés dans l'aérogare et trois sont placés en permanence à la douane américaine et aux points de fouille. Il ne reste que trois patrouilleurs pour couvrir le reste du vaste terrain.
Pour l'instant, ils ne possèdent aucune arme longue, mais la situation changera bientôt, selon l'assistant-directeur du SPVM, Patrick Lalonde.
Réaction d’ADM
Aéroports de Montréal a réagi aux reportages de l’émission «J.E.» en soirée, assurant que la corporation avait le personnel nécessaire pour assurer la sécurité du lieu.
«Le reportage de J.E. sous-entend que la solution serait d’ajouter plus de personnel armé à l’aéroport. Or, il est important de préciser qu’il y a déjà à Montréal-Trudeau du personnel armé, entraîné et prêt à intervenir si une situation d’urgence le justifiait», peut-on lire dans un communiqué.
«La gestion du risque, la prévention et le maintien de la sûreté et de la sécurité sont des préoccupations de tous les instants pour ADM et ses partenaires. Les nombreuses mesures de prévention et de contrôle et les dispositifs de sûreté en place ont su démontrer leur efficacité.»