Un laboratoire montréalais administre du Viagra à des nouveau-nés ayant manqué d’oxygène à la naissance dans l’espoir de réparer les dommages causés à leur cerveau.
Des chercheurs du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) ont découvert que le Viagra diminuait l’inflammation et augmentait le nombre de neurones dans le cerveau de bébés animaux. Ils espèrent maintenant que la petite pilule bleue connue pour traiter les dysfonctions érectiles soit aussi efficace sur les poupons humains.
Au Canada, 5 nouveau-nés sur 1000 sont privés d’oxygène en sortant du ventre de leur mère. Lorsque cette tragédie se produit, les lésions qui se forment dans le cerveau du petit entraînent souvent, plus tard, des troubles d’apprentissage et de développement ou une paralysie cérébrale.
Pour l’instant, il n’existe qu’une seule façon de traiter les bébés asphyxiés: l’hypothermie. Leur température corporelle est abaissée à 33,5 °C pendant trois jours complets, ce qui permet de diminuer l’importance des dommages neurologiques pour un bébé sur sept.
«Il reste tout de même six bébés sur sept qui vont demeurer sévèrement handicapés. Alors nous, on a voulu trouver un moyen de non seulement de prévenir les dommages au cerveau, mais de les réparer une fois qu’ils sont là», explique la Dre Pia Wintermark, pédiatre et néonatologiste à l'Hôpital de Montréal pour enfants du CUSM.
Bébés rats
Le laboratoire que la Dre Wintermark a fondé en 2010, NeoBrainLab, a donc entamé en juillet dernier une étude afin de tester les effets du Viagra sur le cerveau des nouveau-nés. Le médicament avait déjà fait ses preuves sur des adultes ayant subi un accident vasculaire cérébral (AVC).
«Le traitement par sildénafil [dont le nom commercial est Viagra] a fonctionné sur des bébés rats, indique-t-elle. On a été capable de démontrer que ça diminuait l’inflammation dans leur cerveau, qui est souvent à la source des dommages.»
Ces résultats prometteurs ont été présentés à Santé Canada. Étant donné que du Viagra est déjà administré à certains bébés qui souffrent de problèmes pulmonaires, le ministère a approuvé que le médicament soit testé sur une vingtaine de poupons asphyxiés à la naissance.
Prématurés
Chaque nouveau-né participant à l’étude reçoit au hasard le sildénafil ou un placebo pendant sept jours. Il sera ensuite suivi jusqu’à l’âge de deux ans.
Au cours cette période, on étudiera notamment leur cerveau en ayant recours à l’imagerie par résonance magnétique (IRM).
«On pense que le traitement pourrait aussi être efficace sur les bébés prématurés, puisqu’ils développent eux aussi des dommages au cerveau, mentionne Dre Wintermark. On voudrait aussi, si ça fonctionne bien, le tester sur des enfants plus âgés.»