Pas d'armes, pas d'animaux, pas de tabac: les règles sont strictes dans l'abri de la Croix-Rouge à Winnie, petite ville du Texas, mais ceux qui ont dû fuir la tempête Harvey s'en accommodent bien volontiers.
La cantine d'une école a été transformée en refuge susceptible d'accueillir plus de 400 personnes qui auraient besoin de se mettre au sec. Des tranches de boeuf avec des haricots blancs et salade de pommes de terre sont proposées pour le dîner.
Au mur, des écrans diffusent des dessins animés joyeux et colorés, accompagnés de chansons sirupeuses. Tout est fait pour assurer une ambiance reposante.
«Il faut rassurer tout le monde», explique Ray Henrichson, 74 ans, une volontaire de la Croix-Rouge, «il faut leur permettre de penser à autre chose qu'à leurs problèmes».
Elle a installé cet espace en quelques heures au fur et à mesure qu'affluaient des rescapés de plus en plus nombreux. Avec son mari de 78 ans, RJ, ils ont reçu de fréquentes distinctions pour leur travail à la Croix-Rouge depuis des années.
«La plupart sont en état de choc. Ils ont peur de l'inconnu», explique-t-elle à l'AFP. «Ils restent repliés sur eux-mêmes car ils ne savent pas à quoi s'attendre. Beaucoup ont des crises d'anxiété».
Les premiers sont arrivés en bus depuis Mount Belvieu, en bordure de Houston: des employés municipaux leur ont donné cinq minutes pour quitter leur domicile, certains ont dû traverser de l'eau à hauteur de plus d'un mètre.
Soixante-huit personnes sont déjà là. Un bébé pleure pendant qu'une maman essaie de mettre au lit trois enfants surexcités. Une femme se lève pour sortir fumer une cigarette.
«Le vieux monsieur là derrière m'a dit: "ils ne m'ont pas laissé prendre mes lunettes ou ma carte bancaire", il pouvait à peine marcher», confie Ray Henrichson. «Il n'avait même pas pris de vêtements».
Le fond de la salle est réservé à des lits de camp bien alignés, soigneusement préparés avec des couvertures et des sacs de couchage. Des serviettes sont distribuées. Il y a des toilettes et des lavabos mais pas de douches.
«Il suffit peut-être simplement de sortir et se mettre dehors», ironise Carla Parker, une infirmière de 58 ans allongée près de sa soeur jumelle, également infirmière, Darla Fitzgerald, et de son beau-frère Howard, 70 ans.
Personne ne sait combien de temps il faudra rester là, alors que d'importantes précipitations sont encore prévues mardi. La rentrée scolaire était prévue pour lundi, bien peu s'attendent à voir les classes démarrer avant la semaine prochaine.
«Ici en Amérique, le pays a été fondé par des gens qui avaient l'esprit d'aventure», philosophe Darla. Des ouragans, elle en a connu pas mal, mais c'est la première fois qu'elle dort dans un abri.
«C'est une aventure et quand ce sera terminé nous nous retrouverons ailleurs et commencerons une nouvelle aventure».
Quand les Fitzgerald ont eu l'ordre d'évacuer, l'eau léchait les marches de leur autocaravane et l'électricité avait été coupée, sous une pluie battante. Ils ont juste jeté quelques habits, des médicaments et un ordinateur portable dans une valise et se sont engouffrés dans un bus.
Lorsqu'on lui demande comment elle se sent, Darla répond malicieusement: «un petit peu déplacée». Mais ajoute: «c'est mieux que de dormir dans une autocaravane flottant sur une rivière».
Les Fitzgerald trouvent justifiée la décision de ne pas avoir fait évacuer Houston avant la tempête.
«Personne n'était préparé», observe Darla, «nous aurions erré comme des poulets sans tête, ne sachant où aller».
Dehors, des trombes d'eau se déversent, des éclairs zèbrent la nuit. Mais la visite prévue mardi du président Donald Trump au Texas est bien accueillie: «nous sommes des partisans de Trump. Je suis sûre qu'il va prendre soin de nous, il a dit qu'il le ferait donc je suis sûre qu'il le fera», lance Darla.