L’ambiance était à la fête, jeudi, chez les écologistes et les nombreux groupes de citoyens qui célébraient la mort du projet de pipeline Énergie Est, de TransCanada.
«On sabre le champagne ce soir (jeudi)», s’est réjoui Katherine Massam quelques minutes après avoir appris que la compagnie albertaine abandonnait son controversé projet d’oléoduc Énergie Est qui devait passer dans sa cour à Vaudreuil-Dorion.
Et cette militante du groupe Les Citoyens au Courant n’était pas seule. «Je reçois des messages de partout, tout le monde célèbre à la grandeur du Québec», a indiqué Mikael Rioux, activiste indépendant de Trois-Pistoles.
David contre Goliath
Pour eux, il n’était pas question de laisser passer un autre pipeline au Québec, même s’il s’agissait d’«un combat de David contre Goliath», de «simples citoyens contre une puissante multinationale», explique Mme Massam.
«Nous devons célébrer cette grande victoire contre le cynisme qui tend trop souvent à nous faire croire qu’on ne peut pas s’opposer à un projet insensé porté par une grosse compagnie», a dit Martin Poirier, de l’organisation Non à une marée noire dans le St-Laurent.
Selon lui, le projet est tombé grâce à la mobilisation citoyenne qui a permis d’obtenir que l’Office national de l’énergie prenne en considération l’analyse des gaz à effet de serre.
«L’union fait la force. C’est la leçon qu’on doit retenir de cette bataille», a résumé le chef mohawk de Kanesatake, Serge Simon. Pour lui, l’heure n’est toutefois pas à la fête, car d’autres batailles doivent être menées.
Les Premières Nations joindront maintenant leurs forces au Manitoba et en Colombie-Britannique pour stopper deux autres projets de pipelines, Keystone XL et Kinder Morgan.
Grogne dans l’Ouest
La mort d’Énergie Est n’a cependant pas fait que des heureux, en particulier dans l’Ouest du pays où le projet était très attendu. «Nous sommes profondément déçus de la décision, a déclaré la première ministre de l’Alberta, Rachel Notley. C’est un dénouement malheureux pour les Canadiens.»
L’oléoduc aurait transporté, chaque jour, 1,1 million de barils de pétrole brut de l’Alberta ou de la Saskatchewan à destination de raffineries situées dans l’Est du pays.
Mais, «dans un marché mondial inondé de pétrole et avec une transition énergétique qui s’accélère, ce pipeline apparaissait de plus en plus comme un éléphant blanc», a souligné Karel Mayrand de la Fondation David Suzuki.
Une décision qui fait réagir
• «Ça signifie que le monde est en train, progressivement, de quitter l’époque du pétrole» —Philippe Couillard, premier ministre du Québec
• «On est en train de réaliser, clairement, que la réponse, ce sont les énergies renouvelables» —David Heurtel, ministre de l’Environnement du Québec
• «C’est une excellente journée pour l’eau, le climat, l’économie et les droits autochtones. Le monde change et la fin de l’ère du pétrole est en vue» —Patrick Bonin, Greenpeace
• «C’est une belle victoire citoyenne sous l’enseigne d’une solidarité régionale exemplaire» —Marc Demers, maire de Laval
• «Ce projet n’obtenait pas la note de passage au point de vue économique, social, environnemental et de la sécurité publique» —Denis Coderre, maire de Montréal
• «J’imagine que les maires de la région de Montréal vont poliment rembourser les 10 milliards $ en péréquation de l’Ouest» —Brad Wall, premier ministre de la Saskatchewan
• «Il s’agit d’une grande déception et un pas en arrière afin de construire des infrastructures vitales pour envoyer les ressources canadiennes vers les marchés» —Perrin Beatty, Chambre de commerce du Canada
• «Que l’on ait été pour ou contre le développement de ce pipeline, une analyse en profondeur est impérative pour éviter de répéter la même saga» —Yves-Thomas Dorval, Conseil du patronat du Québec
– Avec l’Agence QMI et Stéphanie Gendron