Le premier ministre du Canada n'est pas du tout convaincu par les précisions de la ministre québécoise de la Justice quant à l'application de la loi sur la neutralité religieuse.
«Vous appelez ça des clarifications? Je pense qu’on voit qu’il y a encore beaucoup de choses à clarifier dans ce projet de loi», a lancé Justin Trudeau mercredi à son arrivée au caucus libéral.
La veille, la ministre Stéphanie Vallée avait essentiellement expliqué aux médias que la loi 62 demande à ceux qui offrent et ceux qui reçoivent des services de l'État de le faire à visage découvert, et ce uniquement au moment de la prestation de service. Mme Vallée a insisté pour dire que cette exigence ne s'étendait pas à l'espace public.
Les détails de l'application de la loi, par exemple pour ce qui est d'une femme voilée qui monte dans l'autobus, sont toutefois demeurés complexes.
La semaine dernière, Justin Trudeau avait ouvert la porte à une contestation judiciaire de la loi québécoise, chose qu'il n'a toujours pas exclue mercredi. «On va faire nos devoirs, a-t-il répété. On va s’assurer qu’on est en train d’entreprendre les bonnes étapes par rapport à ça.»
Le premier ministre a réitéré «qu’un gouvernement ne devrait pas dire à une femme ce qu’elle doit ou ce qu’elle ne doit pas porter».
La ministre de la Justice du Québec, Stéphanie Vallée, n’a pas tardé à répliquer aux propos du premier ministre.
«C’est son opinion, a-t-elle lancé. C’est tout. Oui, c’est le premier ministre canadien. Oui, le Québec a aussi le droit de légiférer sur des enjeux qui sont propres, qui sont les siens. Que M. Trudeau ne partage pas notre opinion, c’est son droit.»
Elle a ajouté qu’elle est «confiante» que la loi passera le test des tribunaux.
Pour sa part, le maire d’Ottawa a écrit toute sa «consternation» face à la loi sur la neutralité religieuse dans une lettre virulente adressée au premier ministre Philippe Couillard.
«Je vous écris pour exprimer ma consternation face à la récente décision de votre gouvernement d’aller de l’avant et d’adopter le projet de loi 62. Cette législation régressive constitue une violation du droit fondamental des personnes d’exprimer leur religion de la façon qui leur convient comme le permet la Charte des droits et libertés et une discrimination envers les femmes qui font le choix d’exprimer cette liberté», a indiqué le maire Jim Watson.
Dans le document, le maire dit espérer que le gouvernement Couillard abandonne carrément cette loi face aux vives réactions qu’il provoque.
«J’espère que vous ne vous attendez pas à ce que les chauffeurs d’autobus de la Ville d’Ottawa, qui servent aussi les résidents de la ville de Gatineau, prennent des mesures pour faire respecter cette législation, car, pour être on ne peut plus clair, on leur aura expressément enjoint de ne pas le faire. La Ville d’Ottawa ne participera pas à cette violation des libertés constitutionnelles», a-t-il dit.