L’intimidation liée au poids est la stigmatisation qui fait le plus de victimes chez les jeunes au Québec et pourtant la prévention y est pratiquement nulle, relate une étude alarmante.
Près de 20% des jeunes Québécois du primaire et du secondaire sont victimes d’intimidation liée au poids, révèle un état de la situation au primaire et au secondaire réalisé par Annie Aimé. Présenté jeudi matin au congrès de l’ACFAS, ce pourcentage serait conservateur en raison de la difficulté à recruter des jeunes pour ce type d’études scientifiques, souligne l’auteur qui a réalisé cette recherche avec l’Association pour la Santé publique du Québec.
Ceux qui sont réellement concernés ne veulent peut-être pas répondre parce que ça va leur causer trop de détresse», explique Mme Aimé.
Elle croit d’ailleurs que le nombre de personnes intimidées pourrait se rapprocher des statistiques qui touchent l’obésité au Québec, soit une personne sur cinq.
«On entend tout le temps que c’est une forme d’intimidation comme une autre. Mais, ça ne me rentre pas dans la tête parce qu’elle est plus prévalente que les autres. En réalité, il faut peut-être faire quelque chose de plus», affirme Mme Aimé. L’étude ne démontre pas de différence entre les garçons et les filles. Toutefois, les garçons seraient plus intimidés lorsqu’ils vivent des problèmes de «maigreur».
Les jeunes stigmatisés ont également de la difficulté à dénoncer, alors que 81% des jeunes adolescents victimes ne se sont pas confiés à des adultes.
Pire encore, même s’ils sont blessés, certains affirment que l’intimidation concernant leur poids est «tout simplement» une forme de «blagues» de la part des autres.
Grave conséquence
Or, les conséquences négatives sur la santé de ces jeunes sont infernales.
Par exemple, les liens avec le suicide seraient de «plus en plus» élevés, indique l’experte de l’Université du Québec en Outaouais. «Je ne peux pas vous dire la proportion qui va commettre un acte ou une tentative, mais c’est certain qu’il y a des idées suicidaires».
Les problèmes de mutilation, de maladie cardiovasculaire, de symptômes dépressifs, de faible estime de soi, d’insatisfaction corporelle, de rejet, de moindre performance scolaire et plus grand absentéisme, de prise de poids et de trouble alimentaires affectent les jeunes intimidés en raison de leur poids.
«Ça vient vraiment causer une grande détresse. Et, au secondaire, c’est encore plus important», signale Mme Aimé.
Intervention difficile
Dans les écoles, il existe un malaise face à l’intimidation liée au poids, mentionne la chercheuse. Il y aurait un inconfort de certains intervenants et certains jeunes, principalement en raison des préjugés concernant l’image corporelle.
«Certains peuvent vivre un inconfort», explique Mme Aimé. Et pire encore, d’autres croient important de «sensibiliser» les jeunes qui ont un surpoids à «leur problème».
«C’est un problème qui concerne tout le monde», tranche l’experte.
Quelques chiffres
- 17,5% des jeunes intimidés en raison du poids
- 81% des jeunes adolescents victimes ne se sont pas confiés à des adultes
- 90% des ados de 14 ans à 18 ans ont été témoins d’intimidation de surpoids
- 44,5% des jeunes croient que le poids est la cause principale de l’intimidation
- Au primaire, 63% des jeunes qui présentent de l’obésité sont plus à risque de se faire intimider
- Au secondaire, l’intimidation en rapport avec le poids devient plus sévère, prévalente et plus dérangeante pour les victimes