« Ma fille s’envolait dans la tornade. Je l’ai agrippée, mais elle me glissait des doigts. Je me suis battu, battu. »
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Près de 24 heures après que le pire fut évité, le Gatinois James Widder a versé quelques larmes en faisant le récit des quelques secondes où la tornade a dévasté le logement de sa famille, vendredi. Il a sauvé la vie de sa petite Ariana, 4 ans, en s’y accrochant de toutes ses forces.
« Je n’aurais pas pu tenir cinq ou 10 secondes de plus. Mais je n’aurais pas laissé ma fille mourir seule, effrayée. » Il aurait lâché le cadre de porte auquel il se retenait « et je me serais envolé avec elle. Je l’aurais prise dans mes bras et on serait morts ensemble. »
Vendredi, en fin d’après-midi, M. Widder, sa conjointe et leurs trois enfants de 8 ans, 4 ans et 3 mois sont chez eux, dans le secteur Mont-Bleu. On s’apprête à y faire du pop-corn et à regarder un film.
Dehors, la météo se déchaîne. L’un des enfants lui demande s’il s’agit d’une tornade. M. Widder répond que ce ne sont que les nuages qui font de drôles de choses. Mais voilà qu’il voit qu’une tornade se dirige tout droit vers eux.
Pas le temps...
« On n’a pas eu le temps de se cacher au sous-sol », explique-t-il dans son anglais natal.
« J’ai agrippé les enfants et ma blonde. Je les ai amenés à l’endroit le plus sécuritaire de l’appartement, là où il y a le moins de meubles et le plus de cadres de porte. On était dans un corridor au centre du logement. Je les ai mis par terre. »
Mais voilà que la petite Ariana se met à courir vers sa chambre pour se cacher sous les couvertures du lit. Son père s’élance pour la suivre. Le toit et le mur s’envolent. M. Widder empoigne son avant-bras juste avant qu’elle ne parte aussi au vent.
Il tient alors la petite contre la force du vent qui la tire. La pluie rend sa poigne glissante. Juste au moment où il ne pense plus pouvoir tenir, l’intensité du vent chute.
« C’est incroyable qu’on soit tous sains et saufs. C’est un miracle. Un ange doit veiller sur nous », lance-t-il.
Trauma
« N’empêche qu’elle devra vivre avec ça toute sa vie », regrette le père. La nuit dernière, Ariana s’est réveillée plusieurs fois, lui demandant « est-ce que je vais m’envoler ? » déplore M. Widden.
« Je n’ai pas été capable de dormir. Quand je ferme les yeux, je nous vois nous envoler. »
« J’ai été chanceux d’avoir regardé tant de documentaires sur les désastres naturels et d’avoir su quoi faire », dit M. Widder. Il espère de tout cœur que son témoignage permettra de prévenir d’autres drames en sensibilisant la population.
Lorsqu’on lui parle d’héroïsme et de courage, il balaye l’idée. « Je mourrais pour chacun de mes enfants. »