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Sextos: les écoles privées passent à l’offensive

Les écoles privées passent à l’action en se dotant d’outils pour les aider à gérer les cas de sextos impliquant leurs élèves. Reste à voir à quel point ils pourront être mis en pratique.

Des représentants provenant de la grande majorité des écoles secondaires privées de la province étaient réunis jeudi à Drummondville pour une journée de formation sur les sextos, ces images à caractère sexuel fréquemment échangées entre adolescents.

Selon de récentes données, près d’un jeune âgé de 15 ou 16 ans qui se fait demander des sextos accepte d’en envoyer.

 

 

«Nous sommes sur la ligne de front dans la lutte aux sextos et nous avons la responsabilité d’être prêts à intervenir efficacement pour limiter les dégâts», a affirmé David Bowles, président de la Fédération des établissements d’enseignement privés, à l’origine de l’événement.

Intervenir rapidement

Cette journée de formation s’appuyait en bonne partie sur l’expertise développée par le Service de police de la Ville de Saint-Jérôme et le Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).

En collaboration avec le Centre canadien de protection contre l’enfance, ils ont développé une trousse de sensibilisation et d’intervention destinée aux écoles, qui doivent gérer des problématiques de sextage impliquant des élèves.

Me Marc Forgues, du DPCP du Centre-du-Québec, parle d’une petite «révolution» qui permet de limiter la diffusion d’images compromettantes puisque la majorité des cas sont réglés en quelques jours seulement. «Ça fonctionne vraiment», a-t-il lancé.

Les intervenants scolaires doivent d’abord remplir une grille d’évaluation de l’incident, qui est ensuite transmise par un policier au DPCP. À partir de ces informations, un procureur déterminera en moins de 24 heures s’il s’agit d’un acte impulsif ou malveillant, ce qui entraînera alors le déclenchement d’une enquête policière en bonne et due forme.

Ce sera le cas pour un garçon qui aurait obtenu des photos intimes d’une jeune fille sous la menace, par exemple.

Un acte jugé impulsif - qui n’a pas été commis dans le but de nuire à quelqu’un - sera traité différemment. On peut penser notamment à un garçon qui aurait montré une photo intime de sa copine à un de ses meilleurs amis. Ce type de geste, selon les circonstances, pourrait être classé parmi les «erreurs de jeunesse» ou de jugement, explique Me Forgues.

Justice alternative

Dans ces cas, un processus de justice alternative s’enclenche. Les jeunes concernés sont rencontrés par un policier et doivent s’engager par écrit à supprimer de tous les appareils les images compromettantes. Tout cas de récidive mène alors à ces accusations formelles.

Après avoir mis en pratique cette méthode depuis trois ans, le lieutenant Serge Boivin du Service de police de Saint-Jérôme indique qu’environ neuf cas sur dix se règlent selon cette méthode, sans récidive.

«Ce n’est pas une distribution de bonbons, il y a vraiment une prise de conscience chez les jeunes impliqués», a-t-il dit.

Des questions en suspens

Cette méthode d’intervention a été présentée aux intervenants des écoles privées jeudi. Ces outils ne donnent toutefois pas de réponse aux directions d’école qui se demandent comment gérer un agresseur présumé et une victime qui se côtoient chaque jour dans leur établissement.

À la Fédération des établissements d’enseignement privé, on indique que ce type de décision appartient à chaque école.

Ce type d’intervention, qui nécessite une étroite collaboration entre les services de police et le DPCP, est par ailleurs loin d’être répandue. Ce processus n’est pour l’instant utilisé que par quelques services de police locaux. À la Sûreté du Québec et au Service de police de la Ville de Montréal, on évalue cette option. Du côté du Service de police de la Ville de Québec, on se dit toujours intéressé à améliorer les façons de faire.

La trousse d’intervention Sexto, qui a reçu l’an dernier un prix du gouvernement fédéral, s’est tout de même attirée quelques critiques.

Le mouvement Québec contre les violences sexuelles déplore que ses campagnes de sensibilisation ne visent pas à dissuader les jeunes de réclamer de telles photos. La responsabilité est plutôt mise sur les jeunes qui envoient des photos d’eux-mêmes, déplore sa cofondatrice, Mélanie Lemay.

Le porte-parole du Centre canadien de protection contre l’enfance rétorque qu’il s’agit d’un «bon point». «La prévention, on n’en fait jamais assez», a lancé René Morin.

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