Malgré toutes les preuves qu’un déneigeur a bousillé ses rosiers, un couple résidant dans le secteur Rivière-des-Prairies doit se battre contre l’infernale machine bureaucratique de la Ville de Montréal pour être dédommagé.
Depuis 15 ans, Michel Michot et sa femme entretiennent avec amour leurs 64 rosiers. «On a gagné plusieurs prix d’aménagement paysager, on était très fiers», me raconte M. Michot, nostalgique.
Et paf! Toutes ces années de travail minutieux envolées en fumée quand un déneigeur a défoncé leur terrain en janvier dernier.
Et ce n’était pas n’importe quelle compagnie: Groupe TMD. Cet entrepreneur a souffert d’un manque de main-d’oeuvre qualifiée et a peiné à déneiger correctement le secteur est de Rivières-des-Prairie cet hiver, au point où la mairesse de l’arrondissement, Caroline Bourgeois, a déclaré qu’une rupture de contrat serait considérée.
Maison des fous
La machine bureaucratique s’en fout pas mal des déneigeurs incompétents et des précieux jardins anéantis. Les citoyens ont 15 jours suivants le jour de l’incident (ou à partir du moment où le dommage est constaté) pour faire une réclamation. Point barre.
Et pourtant, dans le cas de M. Michot, il a fait sa demande le jour même où ses rosiers ont été détruits, à l’aide d’un employé d'Accès Montréal. Puis, aucune nouvelle. J’ai vu le document, et pourtant tout semble avoir été fait dans l’ordre.
C’est parce que son avis de réclamation ne s’est jamais rendu. Lorsqu’il l’a appris, un mois plus tard, il s’est fait dire qu’il avait dépassé le délai légal et qu’on ne pouvait rien faire pour lui.
Même lorsque les citoyens ne se heurtent pas aux complications bureaucratiques, si les dommages sont causés par un sous-traitant de la Ville, cette dernière se décharge de toute responsabilité. Si l’entrepreneur ne s’occupe pas de vous, vous devez le poursuivre.
Sommes-nous surpris? Non. Est-ce aberrant? Oui.
Quand on s’en mêle
Il y a quelques jours, lorsque j’ai rencontré M. Michot et constaté l’ampleur des dégâts, j’ai contacté la Ville et l’arrondissement afin d’obtenir leur version des faits. Il a suffi que j’envoie quelques courriels pour que, par magie, les choses bougent. Le Bureau des réclamations a soudainement réalisé que la demande avait été envoyée (il y a trois mois!) dans les délais, l’arrondissement a contacté l’entrepreneur et ce dernier a promis à M. Michot que les dommages seraient réparés.
C’est un dénouement heureux, mais ce n’est pas normal qu’un média doive s’en mêler pour que la Ville traite ses citoyens comme elle le devrait.
Coup de barre dans l’industrie du déneigement
Avant d’octroyer de nouveaux contrats de déneigement, Montréal et Québec comptent faire d’importants changements législatifs qui seront annoncés prochainement.
En mars dernier, avec l’aide de mon collègue Jean Balthazard, nous avons publié une enquête qui prouvait que les déneigeurs du secteur privé doivent souvent travailler des heures inhumaines et sans formation adéquate. L’élu responsable du déneigement à la Ville de Montréal, Jean-François Parenteau, s’était alors engagé à revisiter la politique de déneigement, songeant à ajouter une clause de formation obligatoire dans les contrats octroyés aux entreprises privées.
Au cabinet de la mairesse Valérie Plante, on nous a indiqué que la révision de la politique est en cours et que les changements seront présentés très bientôt.
À Québec, le cabinet du ministre des Transports, François Bonnardel, m’a aussi indiqué que des annonces sont prévues sous peu. D’ici là, le ministre a exigé la mise sur pied d’un groupe de travail, qui doit entre autres définir les critères d’une éventuelle formation obligatoire aux déneigeurs. M. Bonnardel a fait cette déclaration la semaine dernière dans le cadre du dévoilement de l’enquête sur le carambolage du 2 février sur l’autoroute 20, qui a impliqué près de 200 véhicules. Le gouvernement a aussi assuré qu’il y aura plus de patrouilleurs du MTQ pour surveiller les opérations de déneigement et que les pénalités en cas de défauts d’exécution seront plus salées.