Les résultats d’un sondage réalisé par le Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ), dont TVA Nouvelles a obtenu copie, démontrent que 80% des 1700 répondants affirment qu'il n'y a pas de consignes claires concernant les interactions en français avec les Québécois ou ne savent pas si de telles consignes existent dans les ministères et organismes où ils travaillent.
Ce sont 72% qui ont répondu qu'il n'y a pas de directives concernant l'usage du français avec les entrepreneurs québécois, tandis que 19% ont indiqué qu'ils se font demander d'interagir par écrit en anglais avec les entreprises québécoises, même si c'est une infraction à la Charte de la langue française.
«Le gouvernement doit être exemplaire dans sa façon de donner une prestation de services aux citoyens. Ça passe par le français en premier comme langue de travail dans les bureaux et avec les citoyens aussi dans nos communications», insiste le président du syndicat Christian Daigle.
Afin d’appuyer son argumentaire, le SFPQ a demandé à ses membres de donner des exemples.
Un fonctionnaire du ministère du Travail écrit: «Présentement, trop de gens choisissent d'être servis en anglais, alors qu'ils comprennent très bien le français».
Un autre souligne: «On doit servir la clientèle avec la langue de leur choix».
À Revenu Québec «les employés doivent traiter les dossiers qui sont dans leur charge même s'ils ne parlent pas en anglais», écrit-on.
Au MAPAQ un fonctionnaire s'étonne : «contact avec les fournisseurs de plus en plus nombreux à avoir un service exclusivement en anglais».
À la SQ, un fonctionnaire écrit : «Ils veulent qu'on puisse offrir absolument le service en anglais même si la loi ne nous y oblige pas».
Le gouvernement doit donner des consignes claires à ses employés, demande Christian Daigle.
«Ce qui nous fâche c’est que les directives ne sont pas claires que c’est en français que ça se passe avec les citoyens et avec les entreprises. L'État québécois s'anglicise par sa non-conviction de donner des services en français et par le fait qu'il ne force pas ses employés à le faire», déplore le président du SFPQ.
Les promotions réservées aux personnes bilingues?
Autre donnée significative de la consultation, un fonctionnaire sur cinq estime que les promotions sont réservées aux personnes bilingues.
Une employée de Revenu Québec affirme dans le document : «Dans les faits, au service client téléphone, si en entrevue tu dis que tu parles anglais, on t'engage et cela devient la condition d'embauche.
Un fonctionnaire du ministère de l'Environnement se désole. «Ça m'est arrivé deux fois de ne pouvoir postuler pour des postes qui demandaient obligatoirement d'être bilingue», écrit-on.
Renversé par les résultats, le député de Gouin réclame un redressement de situation. «Je ne pensais pas que c'était aussi problématique que ça», s’étonne Gabriel Nadeau-Dubois.
«Je ne comprends pas comment, comme État, on peut exiger des choses des entreprises privées et ne pas l'appliquer chez nous. Il faut demander aux entreprises de respecter la loi 101, mais ce que je lis c’est que l’État du Québec ne respecte pas l’esprit de la loi 101», s’insurge le député Solidaire.
Un sérieux coup de barre s’impose
À la mi-octobre le ministre Simon Jolin-Barrette, responsable de l’application de la loi 101, sommait la Ville de Montréal et dix arrondissements de la métropole de se conformer rapidement à la Charte de la langue française en obtenant leur certificat de conformité.
Interpellé par TVA Nouvelles, le ministre de la Justice s’est engagé à donner un sérieux coup de barre avec son plan d’action pour promouvoir, protéger et valoriser la langue française.
«Le gouvernement doit être exemplaire! On ne peut pas demander aux entreprises, aux citoyens québécois de faire usage de la langue française comme langue commune si, dans un premier temps, l’État n’est pas exemplaire en matière d’utilisation de la langue commune», affirme le ministre Jolin-Barrette.
Du même souffle, il estime que la minorité a des droits : «Les citoyens québécois d'expression anglaise ont droit à des services en anglais, mais ça ne doit pas être un automatisme que les fonctionnaires communiquent en anglais avec des entreprises. La langue de travail au Québec, c'est le français. Ça va changer et c'est un engagement que je prends», conclut le ministre.