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Violents et armés jusqu’aux dents: une épidémie de conflits entre gangs de rue à Montréal

Les gangs de rue liés à la flambée de fusillades des derniers mois à Montréal ont un « potentiel élevé de violence » et n’ont aucun mal à s’armer pour arriver à leurs fins.   

C’est ce que constate le Service du renseignement criminel du Québec (SRCQ) dans un récent rapport confidentiel communiqué à l’ensemble des corps de police de la province, et auquel notre Bureau d’enquête a pu avoir accès.

Après quelques années d’accalmie, le milieu des gangs de rue montréalais est beaucoup plus volatil depuis l’automne 2019.

On observe une « résurgence de conflits internes » dans les deux grandes factions de gangs, tant chez les Rouges que chez les Bleus, selon le SRCQ.

L’agence policière recense quatre gangs dont les noms sont peu connus du grand public, mais que les autorités doivent surveiller. Leurs membres sont réputés pour « détenir des armes à feu » et avoir la gâchette facile.

Deux d’entre eux sont à couteaux tirés dans le nord-est de la métropole, où est concentrée la majorité de la trentaine de fusillades survenues depuis six mois à Montréal, comme le rapportait notre Bureau d’enquête le 9 février dernier.            

  • On cite d’abord les Profit Kollectaz, aussi appelés PK ou Profit Boy$, basés dans le secteur de Rivière-des-Prairies.            
  • Ils sont opposés au gang Zone 43, de Montréal-Nord, baptisé en référence à un circuit d’autobus de la Société de transport de Montréal qui traverse ce secteur.                        

Le « Far-Est »  

« Plusieurs incidents » où des coups de feu ont été tirés impliquent ces deux cliques depuis 2019, souligne le SRCQ.

Le 30 janvier dernier, un homme de 26 ans qui serait lié aux Zone 43 a été abattu en face d’un dépanneur situé au coin de la rue Martial et de l’avenue des Récollets, à Montréal-Nord.

Le pare-brise d’une automobiliste atteint par une balle perdue dans le quartier Saint-Henri, le 25 septembre 2020.

Photo Roxane Trudel

Le pare-brise d’une automobiliste atteint par une balle perdue dans le quartier Saint-Henri, le 25 septembre 2020.

C’était d’ailleurs la seconde fois en l’espace de deux ans qu’un jeune se faisait tirer à cet endroit.

Quelques heures plus tard, un autre homme dans la vingtaine en aurait subi les représailles lorsqu’il a été blessé par balles dans le fief des Profit Kollectaz.

Somme toute, on en sait peu sur les PK. Mais les Zone 43 ont commencé à faire parler d’eux en 2013, à la suite d’un crime prouvant que ses membres ne font pas dans la dentelle.

Le 7 septembre de cette année-là, une demi-douzaine de jeunes détenus de la prison de Rivière-des-Prairies, que les services correctionnels reliaient à ce gang, auraient ligoté, ébouillanté et battu à mort un vétéran des Bo-Gars, l’un des plus anciens gangs de rue d’allégeance rouge à Montréal.

Jean Romel Victor avait été admis à la prison le jour même. À l’époque, les Rouges étaient divisés par un autre conflit interne entre certains vétérans et des plus jeunes comme les Zone 43.

Dans l’ouest aussi  

Le SRCQ fait aussi état de nombreux affrontements au sein des Bleus, l’autre faction des gangs montréalais.

Ces conflits se manifestent surtout dans l’ouest de l’île de Montréal, d’après l’agence de renseignements policiers.

Deux cliques y attirent particulièrement l’attention :            

  • Le groupe Longmore-Edwards ;            
  • Le groupe Drummond.                        

Ces clans, identifiés par les noms de famille de leurs leaders présumés et impliqués dans le trafic de stupéfiants, se livrent une interminable guerre de territoire dans les secteurs de LaSalle et de Lachine.

Ponctué de « plusieurs incidents violents », dont des drive-by shootings [fusillades au volant], ce « conflit perdure depuis au moins 2012 », précise le SRCQ.

Osvaldo Pineda Melgar, 26 ans, décrit comme « une relation du groupe Drummond », a notamment été tué d’une balle à la tête dans son logement de LaSalle en présence de sa conjointe et de leur jeune enfant, le 16 septembre 2019.

La police a réussi à faire accuser trois suspects pour ce meurtre, en plus de multiplier les arrestations dans les deux gangs.

Malgré cela, « le conflit [...] n’est pas près de se terminer et d’autres incidents pourraient avoir lieu », prévoit le SRCQ.

Voici quelques-unes des 700 armes à feu que les policiers du SPVM ont retiré des mains d’individus et de gangs criminels depuis un an.

Photos courtoisie

Voici quelques-unes des 700 armes à feu que les policiers du SPVM ont retiré des mains d’individus et de gangs criminels depuis un an.

EN CHIFFRES  

  • 0: Nombre de meurtres reliés aux gangs de rue en 2017 et en 2018 à Montréal.  
  • 5: Nombre de meurtres qui seraient reliés aux gangs de rue à Montréal depuis un an et demi.            
  • 700: Nombre d’armes à feu saisies par le SPVM en 2020.            
  • 443: Nombre de crimes commis avec une arme à feu et répertoriés par le SPVM en 2020 à Montréal, comparativement à 383 en 2019, une augmentation de 15 %.             
  • 100: Nombre approximatif d’arrestations pour trafic ou possession illégale d’arme à feu par le SPVM en 2020                        

Des victimes innocentes comme pendant la guerre des motards  

Douleur et incompréhension pour ces proches de Meriem Boundaoui qui se sont réunis où l’adolescente de 15 ans a été tuée par balles à Saint-Léonard, le 7 février dernier.

Photo Agence QMI, Maxime Deland

Douleur et incompréhension pour ces proches de Meriem Boundaoui qui se sont réunis où l’adolescente de 15 ans a été tuée par balles à Saint-Léonard, le 7 février dernier.

La vague actuelle de violence attribuable aux gangs fait aussi d’innocentes victimes, ce qui n’est pas sans rappeler la guerre des motards au milieu des années 1990.

La mort d’une adolescente de 15 ans, Meriem Boundaoui, tuée en pleine rue par des coups de feu provenant d’une Mercedes, dans le quartier Saint-Léonard, le 7 février dernier, a soulevé l’indignation dans la population. Presque un mois plus tard, les suspects courent toujours.

Par ailleurs, la police envisage aussi la thèse d’une erreur sur la personne pour le meurtre d’un jeune homme de 23 ans abattu à l’intérieur de sa voiture, dans le secteur de Pierrefonds, le 12 juin 2020.

On compte aussi plusieurs cas de balles perdues, comme celle qui a percuté le pare-brise du véhicule d’une femme qui circulait tranquillement dans le quartier Saint-Henri, le 25 septembre dernier. Elle a subi un important choc nerveux.

Sécurité à l’enjeu  

Le 9 août 1995, les Hells Angels et les Rock Machine s’entretuaient depuis un an quand l’explosion d’une bombe dans la Jeep d’un trafiquant du quartier Hochelaga-Maisonneuve a causé la mort de Daniel Desrochers, 11 ans, qui s’amusait sur le trottoir.

Le gouvernement québécois avait réagi en autorisant la mise sur pied de la super escouade Carcajou et en la finançant à coups de millions de dollars pour s’attaquer aux motards.

La mairesse Valérie Plante et le directeur du SPVM, Sylvain Caron, ont, à leur tour, annoncé la création d’une nouvelle escouade policière à Montréal (ELTA), en décembre, pour lutter contre le trafic d’armes et la hausse des fusillades.

« Les groupes criminalisés restent au cœur de ces évènements violents. On cible des groupes qui sont impliqués dans le trafic de stupéfiants et qui utilisent des armes à feu. L’enjeu central, c’est la sécurité des citoyens », a récemment déclaré au Journal l’inspecteur David Shane, du Service de police de la Ville de Montréal.

Mafieux et Hells tranquilles  

Pendant ce temps, c’est le calme plat dans les plus hautes sphères du crime organisé.

La mafia italienne a connu son dernier règlement de compte à l’automne 2019 et les Hells Angels sont plus discrets que jamais.

« Tout indique que les hauts dirigeants du crime organisé à Montréal arrivent à formaliser des ententes et à se partager les marchés et les territoires », selon le Service du renseignement criminel du Québec (SRCQ) dans un récent rapport.

Mais les membres des gangs de rue, eux, ont du mal à « se démarquer de leur rôle d’exécutants » des sales boulots qu’ils font pour le compte des motards ou des mafieux, selon le SRCQ. 

Le «parrain» des gangs en eaux troubles         

Gregory Woolley, opération Magot

Photo courtoisie

Une lutte de pouvoir se dessinerait entre un ambitieux caïd des Rouges et le clan de celui que la police a déjà décrit comme le « parrain » des gangs de rue montréalais, Gregory Woolley.

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Centaines d’armes saisies à Montréal         

FD-CHEF-GANG-KLOR

Photo tirée de Facebook

Le SPVM a saisi autant d’armes à feu en 2020 qu’à l’époque où les gangs de rue constituaient sa « priorité numéro un » et que la violence de ces groupes criminels atteignait son pic.

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Portrait au Canada         

Michael Deabaitua-Schulde, Hells Angels

Photo courtoisie

Le mois dernier, le Service canadien de renseignements criminels, qui représente le pendant du SRCQ à l’échelle du pays, a rendu public son plus récent rapport sur le portrait national du crime organisé en 2020. 

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