Comment des milliers d’armes à feu illégales se retrouvent-elles en circulation dans la région de Montréal où les fusillades se multiplient?
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L’équipe de «J.E.» a suivi «la route des armes», un réseau emprunté chaque semaine par des contrebandiers pour acheminer illégalement pistolets, mitraillettes et munitions à partir des États-Unis jusqu’aux membres de gangs de rue de Montréal.
Selon des sources, la principale porte d’entrée demeure à ce jour le territoire mohawk d’Akwesasne. Cette réserve autochtone est située «à cheval» sur la frontière canado-américaine à l’extrémité ouest du Québec.

CAPTURE D'ÉCRAN / TVA NOUVELLES / AGENCE QMI
«Il y a des "runners" qui vont amener ça pour de l’argent. Il y en a qui vont faire jusqu’à 5000 dollars par jour», affirme une source en contact avec les contrebandiers.
Demande en hausse
La demande serait actuellement à la hausse en raison de la recrudescence des affrontements entre gangs dans le nord-est de Montréal.
«C’est comme un magasin. Ça roule. Ça peut entrer à coup de 100 par semaine... Parfois, jusqu’à 500 la shot», précise cette même source.

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À partir de cet endroit, les armes suivent un parcours bien établi vers des caches appelées «backroom», stratégiquement dispersées à Montréal et dans les environs avant de se retrouver entre les mains de criminels associés aux gangs de rues.
«Ils vont prendre des personnes qui n’ont pas d’argent, du monde qui n’a pas de "cash". D’habitude, c’est dans la famille. Ils vont mettre les armes là, les entreposer dans des boites, des poches de hockey. En échange, ils vont payer le loyer», détaille une source.
«Ça revient à 6000 ou 7000 dollars pour avoir une boite entreposée là pendant un an, maximum. S’il y a une guerre entre gangs, un affrontement, le monde va s’armer. Le monsieur va avoir un appel et ils vident la place.»
«Tu n’as rien à faire»
Selon notre source, le «service» est parfois complet pour les criminels qui voudraient abandonner leur arme.
«Admettons que tu veuilles laisser ton arme sur les lieux du crime. Ils vont te faire ça sur la réserve», explique-t-il.
«Ils enlèvent les numéros de série, ils vont “taper” ta poignée, les balles vont être dedans. Tu n’as rien à faire, tu ne touches à rien, il n’y a pas d’empreintes dessus. Mais ça, c’est une spécialité qu’on retrouve uniquement sur les réserves de Kahnawake et Akwesasne.»

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«Arrêter ça»
Pour le sergent-détective du SPVM à la retraite, André Gélinas, le gouvernement fédéral devrait allouer des budgets aux policiers pour qu’ils puissent intervenir dans ces lieux.
«Il y a des rapports qui sont produits, et ces rapports sont dirigés vers les chefs de police et les dirigeants politiques. Alors, ils ne peuvent pas dire qu’ils ne savent pas» déplore-t-il.
«Ces gens-là qui ont le pouvoir d’intervenir, qui ont le pouvoir de créer des unités et d’allouer des budgets, quand ils ne le font pas, est-ce qu’ils sont capables de vivre avec le résultat? Les morts et les blessés qui sont causés.»
C’est sans doute l’une ces armes qui a été utilisée le 5 février dernier dans le quartier Saint-Léonard au moment où une adolescente de 15 ans, Meriem Boundaoui, a été tuée par erreur.

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Sa sœur Safia, qui s’est confiée à «J.E», dit espérer que la mort de Meriem ait un impact politique.
«J’espère que sa mort va influencer et arrêter ce massacre, ce scandale. J’espère au fond de mon cœur que M. Trudeau et les responsables du gouvernement vont se réveiller pour arrêter ça», lance-t-elle.