Initier les enfants à la différence et permettre à ceux issus de la diversité de se reconnaître à travers leurs jouets. C’est l’objectif que poursuivent deux pères d’origine camerounaise qui ont lancé leur entreprise proposant des poupées à la peau noire.
«C’est quelque chose qui nous trottait déjà dans la tête, mais encore plus avec ce qui s’est passé l’année dernière et l’ampleur qu’a pris le mouvement Black Lives Matters», a expliqué Gaëtan Etoga, l’un des deux cofondateurs de l’entreprise Ymma.
Pour rappel, le 25 mai 2020, la mort de George Floyd lors d’une arrestation policière à Minneapolis, au Minnesota, avait mené à de nombreuses protestations et mis en lumière les problématiques de discriminations raciales dans la société.
L’entreprise a officiellement amorcé ses activités en décembre dernier. «Il y a aussi eu le confinement, on s’était retrouvé avec beaucoup de temps», a ajouté M. Etoga.
Les poupées proviennent d’un fournisseur basé en Chine. Leurs vêtements sont cousus par des couturières au Cameroun, puis expédiés au Québec, où les poupées sont assemblées et emballées par les deux hommes, qui œuvrent de la maison. Pour l’instant, leur vente se fait en ligne.
Les deux cofondateurs ont notamment été marqués par l’expérience de la poupée réalisée par les Drs Kenneth et Mamie Clark. Dans les années 1940, ce couple de psychologues afro-américains avait montré que les enfants donnaient à des poupées noires des attributs négatifs, alors que les blanches avaient droit à des qualificatifs positifs, les enfants les décrivant comme étant belles et intelligentes.
Quelques tentatives de recréer l’expérience depuis cette époque sont arrivées à des résultats semblables.
«C’est quelque chose qui m’avait blessé, et on s’était demandé ce qu’on pouvait faire par rapport à ça. J’ai deux petits garçons et ça me briserait le cœur de savoir qu’ils ne se trouvent pas beaux», a confié M. Etoga.

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Du Cameroun au Québec
Originaire du Cameroun, Gaëtan Etoga s’est installé au Québec en 2010, après des études à Paris. Il travaille maintenant à temps plein dans le secteur bancaire, tout en se consacrant à ce projet qui «lui tient à cœur».
L’autre cofondateur de l’entreprise, Yannick Nguepdjop, est arrivé dans la province en 2017, après un détour par la France. Il est pour sa part ingénieur dans le milieu de l’industrie automobile, et père d’une jeune fille et d’un petit garçon naissant.
Leur parcours est des plus unique, leur destin s’étant entremêlé sur trois continents. Fréquentant la même école au Cameroun, ils ont tous les deux poursuivi leurs études dans l'Hexagone, avant de s’installer au Québec, à quelques années d’intervalle.
Avec leur entreprise, les deux pères souhaitent que les enfants noirs et métisses «aient des jouets qui leur ressemblent», afin de les aider à construire leur identité et à améliorer leur estime de soi.
«Nos poupées sont pour tous les enfants», a toutefois spécifié M. Etoga. Les deux créateurs espèrent que les poupées auront aussi une influence positive auprès des enfants de toutes les origines.
«On souhaiterait que plus tard, lorsqu’ils seront plus grands, ces enfants aient eu l’occasion, à travers les poupées, de rencontrer des personnes qui ne leur ressemble pas. Ça leur offrira une autre vision du monde qui les entoure», a indiqué M. Nguepdjop.
Les poupées sont disponibles sur le site de l’entreprise.

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