Un recours collectif pour rendre Facebook responsable d’avoir hébergé des pages permettant à des victimes de harcèlement ou d’agressions de nature sexuelle de dénoncer de façon diffamatoire leur agresseur a été refusé par la Cour supérieure.
Ce type de dénonciation avait fait grand bruit, il y a un an. Des pages Facebook comme «Dis son nom» ou «Victims Voices» — sur lesquelles il était possible, pour les personnes se disant victimes de harcèlement ou d’agressions de nature sexuelle, de nommer leur agresseur — ont permis plusieurs dénonciations anonymes.
Dans sa demande en autorisation de recours collectif, le demandeur Charles Lehouillier-Dumas ne visait pas à poursuivre les administratrices de ces pages ou les personnes à la source des dénonciations. C’est l’entreprise Facebook, qui gère les plateformes où ces pages sont hébergées, qui était directement visée.
Le groupe derrière le recours collectif regroupait toutes les personnes dont la réputation a été atteinte à la suite de la publication de leur nom sur ces pages. Quelque 60 000 personnes étaient abonnées à ces dernières, où il était possible de «publier des informations fausses à l’égard des membres (les prétendus abuseurs potentiels) sans effectuer de vérification», reproche le demandeur.
Autorisation rejetée
Sauf qu’à cette étape du processus, la Cour suprême ne devait pas se pencher sur le fond de la cause, elle devait seulement déterminer si les quatre critères nécessaires étaient respectés pour permettre une action collective.
Parmi ceux-ci, le tribunal a estimé qu’il y avait absence de dommage pour le demandeur, puisque sur la liste il était inscrit le nom de Charles Dumas, sans qu’il soit possible de le relier directement à Charles Lehouillier-Dumas.
Même si le recours a été refusé, le tribunal a estimé que les questions en litige étaient «importantes et nouvelles». Des questions qui sont d’ailleurs effleurées dans cette longue décision de 30 pages.
«Ce dossier met en exergue la difficulté de concilier le droit à la vie privée et à la sauvegarde de sa réputation avec la liberté d’expression», est-il écrit.
«Il soulève des questions qui mettent aussi en cause la présomption d’innocence, le droit des victimes d’abus de dénoncer leur agresseur et le rôle délicat que peuvent ou doivent jouer les plateformes des médias sociaux», ajoute-t-on.
Dans une autre cause devant la Cour supérieure, il a été ordonné aux administratrices de la page «Dis son nom» de sortir de l’anonymat. Un abuseur présumé a aussi intenté une poursuite de 50 000$ contre la page et ses administratrices.