La modératrice du débat en anglais Shachi Kurl est sortie de son mutisme samedi plus de deux semaines après avoir fait la manchette pour une question posée au chef du Bloc Québécois sur le racisme, la Loi 21 et le projet de loi 96.
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La question était la suivante : «Vous niez que le Québec a des problèmes de racisme. Pourtant, vous défendez des lois comme les projets de loi 96 et la Loi 21, qui marginalisent les minorités religieuses, les anglophones et les allophones. Pouvez-vous aider les Canadiens qui habitent à l’extérieur de la province à comprendre pourquoi votre parti soutient ces lois discriminatoires ?»
Dans une lettre d’opinion publiée sur le site du «Globe and Mail», Mme Kurl a défendu «sans équivoque» la question adressée à Yves-François Blanchet.
«Je la maintiens parce que la question a donné à M. Blanchet l'occasion de parler de laïcité à des gens hors Québec. Il aurait pu partager la perspective québécoise avec le reste du Canada. Il a choisi de ne pas le faire», écrit-elle.
«La question au chef du Bloc Québécois, Yves-François Blanchet, a créé une controverse au Québec, prenant un récit et une légende qui lui sont propres. Cela a conduit l'Assemblée nationale à me censurer, les caricaturistes à me ridiculiser et les chefs de parti à exiger des excuses», a-t-elle déploré.
Mais Shachi Kurl persiste et signe : «Toutes les questions ont été révisées par l’équipe éditoriale du débat, qui incluait des représentants des tous les réseaux qui l’ont organisé et produit – CBC, CTV, Global et APTN».
Si elle reconnait que la question aurait pu être rédigée différemment, elle n’est pas pour autant convaincue que l’issue aurait été différente. Elle estime que cela n’aurait pas empêche Yves-François Blanchet, Justin Trudeau, Erin O’Toole, Jagmeet Singh et le premier ministre du Québec, François Legault, «de l’exploiter à leurs propres fins».
«Qu'aurait pu faire d’autre M. Blanchet au milieu d'une campagne qui s’essoufflait ? Politiquement, il était logique que M. O'Toole, M. Trudeau et M. Singh saisissent l’occasion afin de protéger leurs campagnes québécoises plutôt que de défendre des principes», peut-on lire.
Malgré la controverse provoquée dans la province, Mme Kurl croit que son silence était jusqu’ici justifiable puisque les élections n’étaient pas encore terminées.
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Elle dit par ailleurs défendre la question au nom de la démocratie et de la protection de la Charte des droits et libertés.
«Je la maintiens, parce que le gouvernement du Québec a signalé que les loi 21 et 96 seraient protégées contre les contestations judiciaires relatives à la discrimination, en vertu des dispositions de dérogation de la Charte des droits et libertés. Et parce que l’Assemblée nationale a inscrit dans les lois 21 et 96 un recours préalable à la disposition de dérogation de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne», plaide-t-elle.
«Je la maintiens, parce que si l’on estime qu’une question ne peut pas être posée, qu’est-ce que cela nous dit sur notre démocratie? Qui doit décider de quels enjeux il est approprié de discuter pendant une campagne électorale fédérale?» ajoute-t-elle.