Le recours à des planchers de bois sous les tabliers de ponts d’étagement très achalandés de l’autoroute 40 soulève des interrogations.
Il est question des deux ponts jumeaux situés au-dessus du boulevard Pierre-Le Gardeur près de la gare de trains de banlieue de Repentigny, tout de suite à l’ouest du pont Benjamin-Moreau, qui lui passe au-dessus de la rivière L’Assomption.
Geneviève Veaudry habite depuis une dizaine d’années tout près de ces deux structures construites en 1967 où 112 000 véhicules (dont 9 % de camions) passent quotidiennement (selon les données du ministère des Transports).

Photo AGENCE QMI, Simon Dessureault
«Ils ont installé plusieurs structures de bois sous la structure de béton, c'est très inquiétant», déplore Mme Veaudry, qui nous a contactés pour nous faire part de ses inquiétudes.
La citoyenne passe sur et sous ces ponts pratiquement tous les jours. Outre la présence de pièces de bois sous le tablier, l’état général des pont l’inquiète aussi.
«Plus ça va, plus on dirait que ces ponts sont sur le bord de tomber, dit-t-elle, ironiquement. Et on dirait que du béton pourrait chuter de la structure n’importe quand.»

Photo AGENCE QMI, Simon Dessureault
Joint pour obtenir des explications, le ministère, par la voix de son porte-parole, Nicolas Vigneault, nous a indiqué que le plancher de bois sous les structures de béton a été installé en 2013 pour prévenir des chutes de béton. «Les vérifications confirment que ça ne compromet en rien la sécurité et l’efficacité de la structure», a-t-il dit.
Toutefois, pour Marc-André Martin, le président de l’Association professionnelle des ingénieurs du gouvernement du Québec (APIGQ), le ministère doit vivre avec un niveau de risque plus élevé pour les usagers, conséquence de la perte d’expertise interne pour réaliser des projets au MTQ.
«Utiliser du plywood pour empêcher les débris de béton de tomber sur les usagers c’est l’équivalent de mettre une chaudière dans votre maison lorsque le toit coule, c’est donc une solution à très court terme», a affirmé M. Martin, en entrevue.
«C’est simple, depuis 15 ans, les gouvernements ont échoué à renforcer leur expertise en ingénierie et aujourd’hui on est rendu à sécuriser nos infrastructures avec du plywood.»
Un expert que nous avons aussi approché, Bruno Massicotte, de Polytechnique Montréal, nous a expliqué, sans commenter le cas de ces ponts spécifiquement, que «de telles mesures doivent cependant être temporaires, surtout que la chute de morceaux de béton est une indication que la structure continue de se détériorer».
La dernière inspection générale rendue publique des deux structures de l’A-40 date du 17 octobre 2019.
«Appareils d'appui endommagés affectant sa stabilité et la qualité de support du tablier de façon très importante», est-il écrit dans le rapport de 90 pages réservé à la structure menant vers l’est, qui a suivi cette inspection.
«Défauts de matériaux pouvant réduire son aptitude à assumer son rôle de façon très importante», est-t-il également inscrit dans ce rapport.
Pour le pont menant vers l’ouest, un rapport de 92 pages, a été écrit. «Défauts de matériaux pouvant réduire sa capacité à supporter les charges de façon très importante», peut-on y lire, entre autres.
Une autre inspection a eu lieu en 2021, mais le rapport n’est pas encore complété.
M. Vigneault, du MTQ, admet qu’il s’agit de structures vieillissantes qui vont éventuellement nécessiter des travaux importants.
«Il peut y avoir un effritement du béton, mais ça ne remet nullement en question l’efficacité de la structure, a cependant assuré M. Vigneault. Ces structures sont tout à fait sécuritaires.»