Un exemple de résilience
Confiné à son fauteuil roulant depuis cinq ans, lorsqu’une des balles tirées par l’auteur de l’attentat de la mosquée a sectionné sa colonne vertébrale, le survivant Aymen Derbali se voit contraint à l’isolement une nouvelle fois en raison de la COVID-19, qui pourrait lui être fatale du fait de son état.

Photo Stevens Leblanc
Aymen Derbali à son domicile où il est confiné.
Le 29 janvier 2017, Aymen Derbali aurait très bien pu être la septième victime de l’attentat de la mosquée.
L’une des sept balles qui l’ont atteint a sectionné sa colonne vertébrale, provoquant dans les heures suivantes quatre arrêts cardiaques et une détresse respiratoire aiguë.
Cinq ans plus tard, le miraculé de cette triste soirée avoue ne pas réaliser que tout ce temps a passé. «Ç’a passé très vite pour moi, cinq ans. On dirait que c’est arrivé hier», réfléchit le père de 45 ans.
Deux années pénibles
Pourtant, les deux premières années ont été longues et pénibles : l’homme a trimé dur aux soins intensifs, à l’hôpital et en réadaptation.
À tel point que sa fille, qui n’avait que 11 mois lors du drame, lui a confié naïvement n’avoir aucun souvenir d’enfance de son père.
«Elle m’a dit : quand j’étais petite, je n’avais pas de père», rapporte l’homme avec émotion.
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«C’est vraiment très important la présence du père. J’imagine l’amertume et le chagrin des familles de mes frères qui sont tombés cette nuit-là», dit le survivant en pensant aux six victimes.
Cinq ans plus tard, M. Derbali a pu gagner un peu de motricité au niveau des mains et des doigts, mais il ne pourra jamais quitter son fauteuil roulant.
De plus, un autre ennemi s’est présenté au détour de sa longue réadaptation, la COVID-19.
Incapable de tousser
La capacité pulmonaire d’Aymen Derbali a été considérablement réduite par son handicap, notamment parce qu’il n’est plus capable de tousser.
«Ça me hante un petit peu [...] C’est vraiment problématique pour moi, ce virus-là, surtout en cas de détresse respiratoire», explique-t-il.
La COVID-19 a ainsi contraint l’homme à « un isolement supplémentaire ».
«Je suis vraiment en isolement total depuis deux ans. Depuis la dernière vague, je ne sors plus, en fait», révèle celui qui connaît l’angoisse de voir sa vie tenir à un respirateur.
Le cœur, la tête, la respiration
Les occasions de sombrer et de tout abandonner ont donc été nombreuses depuis janvier 2017. Mais le père de deux enfants est résilient et accepte son sort avec aplomb.

Photo d'archives Annie T. Roussel
Le périmètre de sécurité autour de la grande mosquée de Québec lors de l'intervention policière le 29 janvier 2017.
«Je crois au destin, ça fait partie de la vie. Un malheur peut arriver et il faut l’assimiler et faire l’effort pour passer la zone de turbulence», dit philosophiquement Aymen Derbali, laissant l’amertume derrière lui.
Grâce à sa foi et à sa famille, il estime avoir traversé la période trouble sans crainte d’y retourner.
«Dieu merci, mon cœur, ma tête et la respiration tiennent le coup ; ce sont les trois choses les plus importantes pour moi», conclut le survivant.