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Le gouvernement devra-t-il retarder l'âge de la retraite?

seniors actifs, retraités

Illustration Adobe Stock

L’évocation de vieux enjeux, comme la nécessité de repousser l’âge de la retraite, a quelque chose de réconfortant dans les circonstances.

Deux publications récentes invitent Ottawa à réfléchir là-dessus, avec des propositions claires. On comprend que le gouvernement est occupé ailleurs, mais le sujet finira par revenir sur la table. 

Voici de quoi il en retourne.

Convertir le REER en FERR à 75 ans  

Luc Godbout s’est adressé à la ministre fédérale des Finances récemment à travers le blogue « Intelligence Memos » de l’Institut C. D. Howe. Dans son message à Chrystia Freeland, le professeur en fiscalité de l’Université de Sherbrooke soutient qu’il est temps de repousser l’âge limite auquel les épargnants sont tenus de transférer l’argent de leur REER vers un compte de décaissement FERR.

Cette limite se situe actuellement à 71 ans, elle n’a pas été haussée depuis l’instauration du REER... en 1957. L’universitaire souligne que depuis, l’espérance de vie pour une personne de 65 ans est passée de 14,5 ans à 20,9 ans (2020).

À compter de juillet 2022, le gouvernement fédéral va bonifier de 10 % la pension de la Sécurité de la vieillesse (PSV) des bénéficiaires de 75 ans. Selon Luc Godbout, Ottawa pose un repère qui pourrait très bien représenter le nouvel âge limite pour convertir son REER en FERR. Ce faisant, il serait possible de travailler à un âge tardif sans devoir décaisser son FERR ; plus que ça, on pourrait cotiser au REER quatre années de plus.

Le gouvernement pourrait aussi, note l’universitaire, offrir la possibilité de retarder la demande de la PSV jusqu’à cet âge (limité à 70 ans aujourd’hui) en échange d’une bonification supplémentaire de la prestation.

L’effet d’un tel changement serait sans doute marginal dans l’immédiat. Une infime fraction des retraités retardent leur PSV à 70 ans, ils seront certainement encore moins nombreux à attendre à 75 ans.

Repousser l’âge « normal » de la retraite  

Le gouvernement ne s’est jamais montré très entiché par l’idée de hausser l’âge obligatoire pour convertir son REER en FERR, la principale recommandation de Luc Godbout, car elle retarderait les entrées fiscales tirées de l’impôt sur les revenus de retraite. D’ailleurs, l’universitaire rappelle que cet âge limite a été abaissé à 69 ans en 1996 dans le but de renflouer plus rapidement les coffres de l’État fédéral. Il a été ramené à son niveau initial en 2007.

Dans un contexte où les finances publiques sont sous pression, l’Institut Fraser suggère d’aller plus loin dans un autre document fraîchement publié : The age of eligibility for public retirement programs in the OECC: 2022 update.

Le groupe de réflexion réputé à droite en matière fiscale tape sur ce clou régulièrement, mais il n’est pas le seul. La population vieillit et le coût du régime de pension fédéral va gonfler jusqu’au tournant de 2030, quand tous les boomers auront franchi la barre des 65 ans. L’Institut Fraser recommande de hausser l’âge normal de la retraite.

Qu’est-ce que cela veut dire ? En gros, augmenter l’âge d’admissibilité aux prestations de la Sécurité de la vieillesse.

Parmi les pays de l’OCDE, le Canada fait partie d’un groupe minoritaire à maintenir l’âge de la retraite à 65 ans ou moins, notent les auteurs du rapport. La majorité a fixé le seuil à plus de 65 ans ou s’apprête à le faire. Certains ont mis en place un mécanisme de révision automatique basée sur l’évolution de l’espérance de vie.

Le gouvernement Harper avait mis en œuvre une réforme visant à progressivement augmenter à 67 ans l’âge d’admissibilité à la PSV. À son arrivée au pouvoir, Justin Trudeau a mis la hache dans ce projet, mais il a conservé un élément de la réforme, soit la possibilité de repousser la pension de vieillesse jusqu’à 70 ans en échange d’une prestation bonifiée.

Les planificateurs financiers recommandent aujourd’hui à tous ceux qui en ont les moyens de toucher leur PSV le plus tard possible, c’est dire qu’il y avait du bon dans le projet conservateur.

L’Institut canadien des actuaires présentait en 2019 une série de changements pour assurer la pérennité du système de retraite. Leurs propositions allaient dans le même sens que celles dont on parle ici.

C’est toujours la même question : a-t-on les moyens de maintenir les régimes publics de retraite tels qu’ils sont quand on vit de plus en plus vieux ?

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