Des leaders autochtones ont demandé mardi d'être exemptés du projet de loi 96 qui vise entre autres à imposer des cours de français aux étudiants des cégeps anglophones.
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Ceux-ci craignent des impacts importants sur la réussite scolaire des étudiants autochtones. Ils ont tenu un point de presse mardi après-midi à l’Assemblée nationale à Québec pour réclamer une fois de plus une rencontre avec Simon Jolin-Barrette, ministre responsable de la Langue française.
Éducation et respect
Parmi les préoccupations des leaders des Premières Nations, la réussite scolaire vient en tête de liste. «L’adoption du projet de loi 96 va forcer l’exode de nos étudiants vers d’autres écoles à l’extérieur de la province. C’est une ironie renversante que finalement les premiers occupants du Québec soient forcés d’aller étudier à l’extérieur de leur territoire», a déploré Ghislain Picard, le chef de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador.
Le Chef du Conseil Mi'gmaq en Gesgapegiag, en Gaspésie, abonde dans le même sens. Pour lui, le projet de loi 96 est une embûche de plus dans le parcours scolaire des jeunes autochtones dont le taux de diplomation est déjà nettement inférieur aux allochtones. «Chez nous, on parle le Mi’gmaq et on parle l’anglais. Il y a quelques personnes qui parlent français. Mais pour les jeunes qui ont étudié en anglais et en mi'gmaq, c’est un effort monumental, que ça prend, pour être capable de réussir puis aller chercher ses crédits», critique John Martin, Le Chef du Conseil Mi'gmaq e Gesgapegiag en Gaspésie.
La grande cheffe du Conseil mohawk de Kahnawake, Kahsennenhawe Sky-Deer, considère que le projet de loi, qui fait partie de la réforme de la Charte de la langue française du gouvernement Legault, est une autre démonstration d’un manque de volonté de réellement tenir compte des réalités des communautés des Premières Nations et perçoit même comme une autre tentative de colonialisme.
«L’exemption c’est vraiment ce que nous recherchons mais le dialogue est la clef présentement. Nous espérons que le gouvernement fera preuve de bonne volonté pour que nous n’ayons pas à durcir nos actions», avertit la cheffe qui rappelle que le chemin de la réconciliation et de la guérison passe aussi par un respect des nations.
Avis de non-recevoir
Questionné dans les couloirs de l’Assemblée nationale, le ministre responsable de la Langue française, Simon Jolin-Barrette y est allé d’une brève déclaration. ‘Comme depuis 1977, tout le monde est soumis à la loi 101’, a-t-il affirmé. Son collègue et ministre des Affaires autochtones, Ian Lafrenière, a tenté de se montrer plus rassurant. «En conférence de presse, ils ont dit à plusieurs reprises que ce qui est important c’est de promouvoir et de respecter les langues des Premières Nations».
Et les oppositions ?
Québec solaire, appuie le projet de loi 96 mais demande au gouvernement Legault de discuter avec les Premières Nations. ‘Le ministre a un rendez-vous à ne pas manquer (...) Il faut protéger le français il n’y a aucun doute. Mais il faut aussi protéger les langues autochtones qui sont encore plus menacées’, a déclaré Manon Massé. Du côté du Parti libéral du Québec, on croit qu’il est encore temps d’amender le projet de loi. Quant au Parti Québécois, qui n’a pas pris part au point de presse, on refuse d’appliquer le terme génocide culturel dans le contexte de la réforme de la loi 101. «Si on peut favoriser leur réussite d’une manière ou d’une autre on est très ouvert. Mais on veut un dialogue de nation à nation qui part sur d’autres bases que celui de génocide culturel pour quelques cours de français», a exprimé le chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon.
Le projet de loi en est à ses dernières étapes et devrait être adopté avant la fin de l’actuelle session parlementaire. Les leaders autochtones réclament une rencontre le ministre Simon Jolin-Barette avant son adoption.