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Les plateformes d’hébergement touristique: une réglementation inefficace

Dans le cadre de la consultation publique sur le nouveau projet de réglementation sur la Loi sur l’hébergement touristique, qui vise à moderniser l’encadrement des pratiques en la matière, le Comité logement du Plateau Mont-Royal (CLPMR) a déposé un mémoire au ministère du Tourisme. L’objectif est de souligner les lacunes réglementaires du cadre législatif en place et d’interpeller le gouvernement pour qu'il agisse concrètement en vue de freiner l’impact néfaste des plateformes numériques d’hébergement touristique sur le parc de logements locatifs.  

Depuis sa création en 2008, Airbnb a transformé le marché de l’hébergement touristique partout à travers le monde. Plusieurs autres plateformes, comme Expedia.ca, Booking.com et WeChalet, ont suivi la tendance en offrant le même type de service.  

Logements plus chers et moins nombreux 

L’expansion de cette industrie n’est toutefois pas sans conséquence. Selon une étude menée par David Wachsmuth, professeur à l’École de développement urbain de l’Université McGill, cela fait grimper le prix des loyers et réduit considérablement l’offre de logements locatifs.  

Cette même recherche indique que les logements annoncés sur Airbnb totalisent 2 à 3% du parc immobilier résidentiel dans certains quartiers de Montréal. Cela contribue à la diminution marquée de l’offre de logements dans ces secteurs et entraîne des hausses de loyer importantes dans les environs. La rareté des logements et leur prix inabordable sont de véritables problèmes pour les populations vulnérables, particulièrement pour les familles et les personnes âgées.  

Les évictions et les reprises de mauvaise foi de logement sont des tactiques de plus en plus utilisées par les propriétaires qui veulent se débarrasser de leurs locataires afin d’exploiter leurs résidences pour de la location à court terme. Selon une étude du Devoir, 45 décisions ont été rendues au Tribunal administratif du logement pour des poursuites de reprises frauduleuses en lien avec Airbnb entre la fin mars 2021 et la fin mars 2022.  

La hausse de cette pratique chez les propriétaires démontre qu’Airbnb et ses semblables ne sont pas seulement des plateformes collaboratives qui permettent aux individus de louer leur résidence principale pendant leur absence pour arrondir les fins de mois, mais sont surtout une opportunité de profit pour de grandes entreprises. En effet, près de 50% de tous les revenus d’Airbnb en 2018 ont été générés par des gestionnaires qui administrent plusieurs annonces, et la majorité des profits réalisés par les hôtes a été encaissée par 10% des plus riches.  

Nuisance à la qualité de vie 

De même, les locations de type Airbnb ont des conséquences sérieuses sur le voisinage. Plusieurs résidents de quartiers centraux se plaignent de nuisances en lien avec l’hébergement touristique de courte durée: le bruit et l’accumulation des déchets sont des problématiques courantes qui nuisent à la qualité de vie des citoyens.  

La réglementation instaurée par le gouvernement dans les dernières années n’a pas eu les effets attendus, en raison d'un manque de ressources consacrées au respect du cadre législatif. Depuis 2020, les propriétaires offrant de la location de courte durée se voient dans l’obligation d’obtenir un permis d’exploitation auprès du ministère du Tourisme. Toutefois, la grande majorité des locateurs qui louent leurs résidences sur des plateformes d’hébergement touristique n’affiche pas de numéro d’enregistrement. En 2021, 6130 annonces étaient actives sur la plateforme Airbnb à Montréal, alors que seulement 128 propriétés ont été enregistrées pour de la location à court terme.  

Le processus d’application de ces mesures est inefficace. Trop de propriétaires fautifs échappent au système et les amendes ne sont pas dissuasives. Pour l’année 2021-2022, Revenu Québec a effectué 5629 inspections, donné 1784 avertissements et traité 1759 infractions en poursuites pénales, qui ont abouti à 142 condamnations.  

Les effets néfastes de ces entreprises sur le parc de logements locatifs et les milieux de vie sont bien documentés. Pourtant, le gouvernement québécois ne prend pas les mesures nécessaires pour encadrer l’usage de ces plateformes. Cette industrie ne cesse de croître et les impacts sont considérables pour la population québécoise. Dans ce contexte, une réforme du cadre législatif sur l’hébergement touristique s’impose pour assurer le droit au logement, trop souvent laissé pour compte au profit du droit de propriété.  

Bien que nous préconisions l’interdiction de l’usage des plateformes d’hébergement touristique, dans le contexte actuel, le Comité logement du Plateau Mont-Royal recommande au ministère du Tourisme de responsabiliser les plateformes d’hébergement touristique en les obligeant à bloquer les annonces non conformes aux règlements en vigueur, comme cela se fait à Amsterdam.  

Cette lettre est appuyée par les organismes suivants: 

RCLALQ 

POPIR - Comité logement 

Comité logement Ahuntsic Cartierville 

Action dignité de Saint-Léonard 

Comité logement Ville-Marie  

Association des locataires de Villeray 

Infologis de l'Est de l'Île de Montréal 

Regroupement Information Logement de Pointe-Saint-Charles  

FRAPRU  

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