Un adolescent de 15 ans qui aurait été poussé à se prostituer par une proxénète alléguée a raconté jeudi l’enfer qu’il aurait vécu, mais aussi la manipulation subie afin de lui faire croire que c’était simplement du « travail ».
« Quand je ramenais de l’argent, elle était super contente, elle me disait qu’elle était fière de moi, que je faisais du bon travail. Mais c’est pas un travail, c’est de l’abus sexuel, de l’humiliation, elle m’utilisait », a émotivement témoigné la victime alléguée de Daphné Leblanc-Guibault, jeudi au palais de justice de Montréal.
L’adolescent, dont l’identité est protégée par le tribunal, dit être tombé dans les griffes de la proxénète pendant six mois, de 2018 à 2019, peu après être arrivé de région à Montréal à l’âge de 15 ans.
Innocence
Et quand il a perdu son emploi, Leblanc-Guilbault, qui l’impressionnait avec l’argent qu’elle montrait, l’aurait alors convaincu de devenir escorte.
« J’étais très innocent à la vie réelle », a-t-il dit, en ajoutant que de sa compréhension, être escorte signifiait de passer du temps avec les clients sans forcément offrir des services sexuels.
Selon leur accord, Leblanc-Guibault prenait 50 % des revenus en frais de « protection », mais selon l’ado, bien souvent, l’accusée de 26 ans ne surveillait rien.
Une fois, un client aurait étranglé le jeune et plus tard, la proxénète alléguée lui aurait dit de ne pas s’inquiéter et que « ça arrive ».
« Elle m’a appris comment faire de l’argent, comment faire des annonces, comment manipuler les clients pour soutirer plus d’argent... Sa volonté, c’était de contrôler un enfant de 15 ans », a un moment lâché le jeune, visiblement submergé par l’émotion.
Manipulation
Et s’il s’est fait avoir, c’est parce que Leblanc-Guilbault était une bonne manipulatrice, croit-il. Car au fil du temps, elle aurait réussi à lui faire croire qu’elle était sa meilleure amie, et qu’elle était la seule à le comprendre.
« J’étais tellement ancré là-dedans, elle voulait que mon cerveau se dise que ça va me faire du bien de toujours revenir vers elle, a témoigné le jeune. Au début, elle était gentille, à la fin moins. J’ai vécu des expériences profondément traumatisantes. »
Car pour pouvoir profiter de la « gentillesse » de Leblanc-Guibault, le jeune devait ramener toujours plus d’argent.
« C’était comme un cercle vicieux », a-t-il dit en ajoutant qu’en six mois, il s’est ainsi prostitué partout en Ontario en étant conditionné pour qu’il croie que c’était « normal ».
Son témoignage, devant la juge Suzanne Costom, se poursuit vendredi. Leblanc-Guibault, qui est accusée de proxénétisme, est présentement détenue préventivement.