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Enfants autochtones portés disparus après un séjour à l’hôpital : une quête difficile

Depuis l’adoption de la Loi 79, 73 familles autochtones se sont lancées à la recherche de leurs enfants qui ne sont jamais rentrés d’un séjour à l’hôpital.

L’équipe mise en place par Québec, en collaboration avec l’organisme Awacak, est à ce jour sur les traces de 110 enfants qui sont décédés ou portés disparus après avoir été admis à l’hôpital entre 1933 et 1978. 

Après un an de recherche, les familles commencent enfin à obtenir des réponses. 

C’est le cas de Marie-Ange Malec, une innue de 88 ans, qui a perdu quatre enfants dans le système de santé, des poupons conduits à l’hôpital d’Havre-St-Pierre dans les années soixante. 

«C’est un médecin ou une infirmière de l’hôpital qui venait à la maison chercher l’enfant malade. Il prenait l’enfant et partait. Après on avait plus de nouvelles. Est-ce qu’il est décédé? Qu’est-ce qui s’est passé? Ils partaient et on ne le revoyait plus jamais», témoigne-t-elle.

L’équipe de TVA nouvelles a pu assister à ce moment unique où on lui remet les informations concernant ses enfants Monique, Anne, Agnès et Luc.

L’heure des réponses

C’est dans la petite maison de Marie-Ange Malec, dans la communauté de Nataskuan, que l’équipe chargée des recherches, mise en place après l’adoption de la Loi 79, vient présenter le fruit de son travail. 

Cette équipe est composée de membres de la Direction de soutien aux familles, à Québec, et de l’organisme Awacak, qui fait le lien avec les familles.

«Je sais que ce n’est que du papier, mais je voulais que vous l’ayez avec vous. Nous avons inscrit le nom de chaque enfant. Et nous allons vous parler de chacun d’eux», explique Florence Dupré, la coordonnatrice de la Direction de soutien aux familles (DSF), en remettant un cartable rempli des précieux documents qui retracent le fil de la courte vie des quatre enfants. 

Un médecin les accompagne pour bien expliquer la cause des décès. 

«C’est surtout des cas de gastro, de septicémie, des infections chez des bébés de 4 à 6 mois. Les bébés étaient transférés sans escorte et les parents n’ont jamais eu de nouvelles. C’est encore très vif pour eux. Je me mets à leur place», partage Dr Eric Poirier, médecin à la retraite qui a pratiqué pendant plus de 30 ans à l’hôpital de Sept-Îles.

Si les pièces du casse-tête se mettent en place, le chemin vers la vérité n’a rien de facile. Les dates ne correspondent pas toujours, les noms sont souvent mal retranscrits, les dossiers médicaux sont incomplets et des institutions tardent à remettre l’information. 

Il aura fallu plus de six mois avant que le CISSS de la Côte-Nord réponde à la demande de dossiers médicaux faite par la DSF. 

«Il n’y a pas que Baie-Comeau, il y a d’autres hôpitaux aussi. C’est assez choquant de voir qu’il y a des CIUSSS qui n’ont pas compris la loi 79 qui les oblige à répondre aux familles», critique Anne Panasuk, conseillère spéciale du ministre Ian Lafrenière, responsable des Relations avec les Premières nations et les Inuits. 

Dans ce contexte, chaque information doit être analysée pour s’assurer qu’il s’agit bel et bien des enfants recherchés. 

«C’est un processus très difficile émotionnellement. Ça vient rouvrir des plaies que ça faisait longtemps. Ma mère a besoin de savoir ce qui s’est passé avec ses propres enfants. C’est pour la dignité de cette femme», poursuit sa fille, Marie-Josée, qui l’accompagne dans tout le processus.

Un cimetière déplacé

«Ce que je souhaite le plus, c’est qu’on me dise où mes enfants ont été enterrés. Il faut que les recherches se poursuivent. Il faut continuer de dire que ce n’est pas correct ce qui s’est passé», déclare la mère innue. 

Les informations colligées par la DSF pointent vers un ancien cimetière innu situé dans le village de Natashquan, à quelques kilomètres de la communauté autochtone du même nom. Or, selon de nombreux témoins, le cimetière a été détruit pour construire l’école. 

Sur place, seules deux sépultures semblent avoir résisté, rajoutant un défi supplémentaire à la recherche du lieu exact d’inhumation pour qu’enfin Marie-Ange Malec puisse se recueillir sur la tombe de ses quatre enfants.

La quête de Marie-Ange Malec n’est pas encore terminée, tout comme celle de 72 autres familles. Et ce ne serait que la pointe de l’Iceberg.

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