La violence dans les écoles a pris de l’ampleur depuis la pandémie. Selon plusieurs enseignants et éducateurs spécialisés, les comportements agressifs d’élèves sont plus fréquents en classe, que ce soit au secondaire ou au primaire.
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Ça ne devrait pas être possible qu’un enfant frappe à répétition les enseignants, déplore Jean-François Guilbault, président du Syndicat de Champlain affilié à la Centrale des syndicats du Québec (CSQ).
« La réalité c’est qu’on a du personnel qui se fait frapper par des enfants de 5-6 ans à répétition. Qui vont casser des meubles, lancer des livres, des dictionnaires, du matériel sur la tête du personnel et des élèves dans la classe », a-t-il expliqué dans une entrevue à l’émission J.E diffusée ce soir à 21 h 30, à TVA.

Capture d'écran J.E
Une classe de maternelle virée à l’envers sur la Rive-Sud de Montréal.
« Certains doivent partir en ambulance à l’hôpital parce qu’ils ont subi des chocs importants. On parle de commotions cérébrales, de fractures, de contusions. Probablement que la majorité des gens ne s’imaginent pas que c’est possible à un si bas âge d’avoir des comportements de cette nature-là. »
- Écoutez l'entrevue avec Josée Scalabrini à l’émission de Philippe-Vincent Foisy diffusée chaque jour en direct via QUB radio :
700 agressions
Lorsqu’un enseignant ou un éducateur spécialisé subit un geste violent, il remplit habituellement une déclaration d’incident où il relate ce qui s’est passé.
L’automne dernier, il y a eu des déclarations pour près de 700 agressions physiques et verbales dans trois centres de services scolaires de la Rive-Sud de Montréal, soit Marie-Victorin, des Patriotes et de la Vallée-des-Tisserands.
« Moi j’ai déjà eu des élèves qui m’ont lancé une chaise, une paire de ciseaux, des souliers », a témoigné une enseignante de première année.
La femme qui enseigne depuis 25 ans demande à ne pas être identifiée parce qu’elle n’est pas autorisée à parler aux médias.
« Je dois protéger les autres élèves dans ma classe durant qu’il y en a un qui fait sa crise », dit-elle. Ce qu’on nous dit de faire, c’est de sortir les autres élèves et laisser celui en crise dans la classe. »
L’enseignante affirme que le saccage est souvent considérable lorsqu’elle retourne dans son local.
DES PROFS REFUSENT DE TRAVAILLER
La situation est telle que, dans certaines classes, des enseignants exercent leur droit de refus de travailler pour des raisons de sécurité.
« Avant on ne voyait pas ça chez les enseignants. On voyait ça dans le milieu de la construction. Mais là on voit ça venir en éducation », indique Jean-François Guilbault, président du Syndicat de Champlain.
Le nombre d’enseignants ou d’éducateurs spécialisés qui ont été indemnisés par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) après avoir été victimes d’élèves agressifs a grimpé de 65 % depuis 2018.
Tous les jours
Ce sont ceux qui ont dénoncé, qui ont porté plainte, qui ont suivi tout le processus pour être indemnisés, estime Josée Scalabrini, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement.
« Mais la violence dans nos écoles c’est tous les jours qu’il y en a là. C’est quotidiennement et c’est géré de façon différente d’un centre de services à l’autre. »
UN EFFET POST-COVID EN CLASSE
Selon un des plus grands experts de la réussite scolaire au Québec, il ne fait aucun doute que l’effet post-COVID se ressent dans les classes. Égide Royer affirme que toutes les études sur la question démontrent une augmentation des difficultés de comportement, d’agressivité et d’opposition de la part des élèves.

Photo Agence QMI, Simon Clark
Égide Royer, chercheur.
Un des problèmes, selon le chercheur, est que la formation universitaire au Québec ne prépare pas suffisamment les enseignants à faire face à des comportements agressifs comme on en voit maintenant en classe.
Égide Royer déplore que les agents de bord soient mieux formés pour composer avec des passagers agressifs qu’un enseignant avec des élèves violents. Il y a des lacunes importantes, selon lui.
« Faites une crise dans un avion, les agents de bord savent quoi faire. Ils ont des protocoles d’intervention pour régler ces situations. Un enseignant a trop de lacunes pour intervenir adéquatement. »