Dans une récente entrevue, le premier ministre du Québec, François Legault, a indiqué sa volonté de procéder encore une fois à des réformes en éducation. Encore une fois parce qu’il semble que le projet de loi 40 abolissant les commissions scolaires francophones pour les remplacer par des centres de services scolaires ne suffise pas. Le gouvernement veut maintenant nommer lui-même les directeurs généraux de ces organismes créés il y a à peine deux ans. Ou le projet de loi 40 a été mal rédigé ou il ne permet à M. Legault d’asseoir son autorité politique sur les CSS.
En nommant ainsi les DG des CSS, ceux-ci comprendront qu’ils seront assis sur des sièges éjectables, le gouvernement ayant également le pouvoir de les démettre. Ces derniers risquent donc d’être plus «dociles», même si on les a très peu entendus entre autres au cours des ratés du règne du ministre Roberge.
On pourrait voir un aspect positif à cette mesure. Elle permettra de contourner ceux qui empêchent le système de fonctionner efficacement ou imposent des initiatives douteuses. La critique de M. Legault à l’égard de la CSSDM quant au démantèlement de l’équipe volante d’orthophonistes en est un bon exemple.
Décisions douteuses
Par contre, cette mesure empêche davantage les actions d’un contrepouvoir nécessaire. Parfois, ce sont certaines décisions douteuses du ministère de l’Éducation lui-même qui doivent être remises en question. Sous le ministre Roberge, ce sont les CS anglophones et la société civile qui ont mené la charge dans le cas de la ventilation déficiente des classes. Les DG des CSS francophones, eux, ont été aux abonnés absents.
Un autre cas récent est le DG du centre de services scolaire du Pays-des-Bleuets qui s’est fait rabrouer alors qu’il indiquait qu’il était impossible pour son organisme de satisfaire les exigences politiques de la CAQ en ce qui concerne les maternelles 4 ans. Une position à laquelle l’actuel ministre de l’Éducation, Bernard Drainville, s’est finalement rallié quelques semaines plus tard. La réalité du terrain a, pour une rare fois, gagné la bataille.
Pouvoir centralisé
Dans les faits, avec les changements préconisés par M. Legault en éducation, on se risque de se retrouver avec un système où le pouvoir sera encore plus centralisé dans les mains du gouvernement, comme c’est le cas avec le ministère de la Santé, avec les résultats que l’on connait. On est loin d’un système scolaire décentralisé et détaché d’un parti politique.
Pour un gouvernement qui entend quasiment imposer des forums de discussion concernant le renouvellement des conventions collectives de ses fonctionnaires, on a la désagréable impression que le dialogue est à géométrie variable. Pour le personnel scolaire, on se moque de qui détient le pouvoir décisionnel. Ce que l’on désire avant tout, ce sont des mesures efficaces basées sur la science ainsi que sur des données probantes divulguées de façon transparente.
Luc Papineau, Enseignant de français