Jean-Eudes Fournier est catégorique quand on lui parle du drame qui s’est joué sous ses yeux lundi. «Ma femme, je lui dois tout. C’est elle qui m’a sauvé la vie», a confié le septuagénaire au premier ministre, lui racontant qu’il n’était pas sorti de chez lui depuis le drame.
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L’homme et sa conjointe, Micheline Poirier, marchaient paisiblement sur le boulevard Saint-Benoît lundi. Ils se sont arrêtés quelques minutes pour jaser à leur ami Gérald Charest, sans savoir que dans ce «Salut!» rempli de la bonne humeur typique de l’homme, ils entendaient ses dernières paroles.
«Il était content, il riait. Je lui ai dit : ‘’Toi tu es un p’tit comique’’», se remémore avec émotion M. Fournier.
Depuis, c’est le choc.
Le couple n’était pas sorti de la maison depuis trois jours. C’est la visite du premier ministre qui les a convaincu de remettre le nez dehors et surtout, de revenir sur les lieux de la tragédie.
«Il faut continuer à sortir», leur a suggéré François Legault, les invitant à ne pas hésiter à aller chercher de l’aide.
«On est bien entouré», lui ont assuré Jean-Eudes Fournier et Micheline Poirier.
Sauvés in extremis
Lundi, c’est cette dernière qui a entendu le bruit du camion qui s’amenait en trombe. À peine le temps de crier «Attention!» et de pousser son mari que la camionnette était passée. Rendu quelques mètres plus loin, Gérald Charest n’a pas eu la même chance.
«Il s’en allait, il était de dos. J’ai crié, mais il était trop tard», explique Jean-Eudes Fournier.
Pour la fille du couple et leur gendre, la journée de lundi aura aussi été chargée en émotion. Quand le bruit du drame commençait à courir en ville, Frédéric Bureau et Sarah-Josée Fournier ont pensé à Jean-Eudes et Micheline.

Photo Pierre-Paul Biron
Le couple marche souvent au centre-ville, rapidement l’inquiétude s’est installée et a grimpé d’un cran quand leurs appels à la maison restaient sans réponse.
«Sur l’afficheur, on avait un appel d’un numéro qu’on ne connaissait pas. En fouillant au travail, on a su que c’était une policière de la SQ, donc on est monté directement à l’hôpital», raconte M. Bureau, qui peinait toujours à croire que le destin ait épargné ses beaux-parents.
Réussir à oublier l’horreur
Encore sous le choc de ce qu’ils ont vu, le couple sortait pour la première fois de sa maison jeudi. Ils étaient heureux de la visite du premier ministre et des autres politiciens, un geste qu’ils ont qualifié de «chaleureux».
«Ça met un baume un peu sur ce qu’on a vécu. Ça fait du bien», affirme l’homme de 75 ans.
Et pour l’avenir, s’il dit souhaiter que les politiciens se souviennent d’Amqui et fassent honneur à la mémoire des victimes en prenant des actions, Jean-Eudes Fournier, lui, veut oublier.
«Je ne veux plus me souvenir de ça.»