Une ex-douanière corrompue qui a facilité l’importation de 182 kilos de cocaïne espérait pouvoir purger le reste de sa peine chez elle, mais elle devra plutôt aller en maison de transition, a tranché la Commission des libérations conditionnelles du Canada.
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Stéfanie McClelland a été condamnée en 2017 à 11 ans de détention pour avoir laissé passer de la drogue d’une valeur de 6 à 10 M$ aux douanes.
Elle avait été arrêtée trois ans plus tôt, au poste frontalier de Saint-Bernard-de-Lacolle, là où elle travaillait depuis 13 années.
Manipulée par un trafiquant de drogue de qui elle était éprise, elle avait laissé entrer au Canada une voiture remplie de sacs de drogue.
Elle travaillait alors à la guérite réservée aux voyageurs réguliers détenant une accréditation Nexus. Mais les passagers de la BMW X3, Gregory Singh et Ariane Desgroseillers-Lafrance, n’étaient pas membres de ce programme.
Aveuglement volontaire
Et malgré un signal d’alerte en rouge apparaissant à son écran l’obligeant à envoyer le véhicule à la fouille, elle avait laissé les voyageurs poursuivre leur route en quelques secondes.

Photo courtoisie
Le couple, qui était déjà dans la mire de la GRC, avait été arrêté 11 km plus loin.
Stéfanie McClelland, qui s’était fait passer les menottes peu après, avait plaidé la distraction. Elle avait par la suite toujours nié son implication. Après sa condamnation, elle avait même porté sa cause en appel, en vain.
En liberté dans l’attente de la décision du plus haut tribunal de la province, elle avait finalement commencé sa peine en février 2020.
C’est en détention qu’elle a pour la première fois admis ses torts.
«J’ai toujours nié avoir vu le bandeau rouge sur mon écran... mais je l’ai vu. J’ai vu mon écran», a lancé la détenue de 45 ans à l’attention des commissaires des libérations conditionnelles, lors d’une récente audience.
La mère de quatre enfants tentait alors d'obtenir la permission de purger le reste de sa peine à son domicile, plutôt qu'en maison de transition.
Elle avait expliqué que si elle avait accepté de laisser passer la voiture, c’était pour faire plaisir à son ex-amant, Soninder Dhingra. Malgré des doutes, elle disait ignorer qu’il était un acteur connu du monde des stupéfiants.
«Important pour moi»
«Vous n’avez jamais vu ça venir?» lui a demandé une des commissaires.

Courtoisie
La femme, qui venait de se sortir d’une relation toxique, était éblouie par des cadeaux et l’attention que l’homme lui portait. Elle disait être frustrée envers son employeur et déterminée à faire plaisir à son ami.
«Il avait une importance pour moi, je ne posais pas les questions, a-t-elle répondu. Je ne voulais pas le savoir.»
Elle a dit qu’elle était alors convaincue qu’elle faciliterait le passage de lingots d’or, et non de cocaïne.
Si elle demandait à retourner chez elle, c’était pour être présente pour ses enfants ainsi que sa mère malade. Elle disait aussi avoir confiance de se trouver un emploi.
Mais les commissaires Karine Dutil et Jessie Landry-Marquis ont estimé qu’il était trop tôt pour qu’elle obtienne une telle liberté.
Encore du travail à faire
«Il est ressorti de l’audience qu’il est nécessaire que vous poursuiviez votre réflexion de façon plus approfondie en ce qui concerne une saine gestion de vos émotions et la mise en pratique des outils enseignés au moment opportun», ont-elles dit dans leur décision rendue publique vendredi.
Elles ont aussi noté que l’ex-douanière a, pendant près de six ans, continué à nier ses délits, en plus de tenir ses proches et elle-même «dans la poursuite de [son] aveuglement volontaire».

Courtoisie
Ainsi, considérant que sa criminalité s’inscrit dans un contexte de «vulnérabilité affective et d’estime de soi», mais aussi par des «valeurs élastiques», les commissaires ont imposé une «période transitoire nécessaire».
«Un certain encadrement est toujours de mise afin de s’assurer que, dans les moments de vulnérabilité, vous ferez les choix judicieux. Il ne faut pas oublier les motifs qui vous ont menée vers la criminalité», ont-elles écrit.
Pendant six mois, elle devra ainsi aller en maison de transition trois jours par semaine et pour pourra ensuite passer quatre jours chez elle.
Après cette période de semi-liberté, la libération conditionnelle totale lui sera accordée.