Madame la ministre des Transports et de la Mobilité durable,
Cela fait 6 ans que ma femme Élizabeth et moi avons vécu le pire cauchemar pour des parents. Le 20 mars 2017, notre fille Jessica, âgée de 26 ans, est décédée des suites d’une collision causée par une personne conduisant avec les capacités affaiblies par l’alcool et les drogues. Aucun mot ne pourra jamais décrire la douleur, la détresse et le désespoir qui ont empli et changé nos vies et celle de nos proches. Jessica était l’aînée de trois enfants, et notre seule fille.
Elle s’est fait voler son avenir. Plutôt que de marcher vers l’autel avec elle pour son mariage, je n’ai pu que marcher à ses côtés pour son incinération.
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En cette semaine nationale de la prévention de la conduite avec facultés affaiblies, il faut rappeler que passer un bon moment entre amis et proches peut se faire de façon sécuritaire, sans mettre sa vie et celle des autres en danger. Les alternatives sont nombreuses : taxi, parents, amis, conducteur désigné, etc. Ruiner la vie d’une famille pour une mauvaise décision doit dorénavant faire partie du passé.

Photo fournie par la famille
Changements à apporter
Je ne peux pas changer le passé, mais je peux changer l’avenir et j’ai besoin de vous. Comprenez-nous bien, nous ne réclamons pas que les gens cessent de consommer. Nous leur demandons de ne pas conduire avec les capacités affaiblies et de choisir une façon sécuritaire pour rentrer chez eux.
Mon souhait le plus cher est qu’il ressorte du positif de la mort de Jessica, comme elle l’aurait voulu. À sa mémoire et en celles des trop nombreuses victimes, il est possible de changer les choses au Québec. Mon souhait se concrétiserait ainsi : que le Québec suive l’exemple des autres provinces qui ont réussi à abaisser leur nombre de décès en appliquant des sanctions administratives pour les conducteurs dès un taux d’alcool dans le sang de 0,05.
Je tiens à distinguer ici les mesures administratives qui relèvent des provinces des sanctions associées au Code criminel fédéral, lequel fixe la limite à 0,08, et dont les peines (casier judiciaire, prison, etc.) diffèrent des sanctions administratives.
Mesures provinciales attendues
Des mesures provinciales aideraient à sensibiliser et prévenir des tragédies comme celle que nous avons vécue en donnant les moyens aux policiers d’agir (suspension de permis, mise en fourrière et amendes). Les autres provinces ayant instauré des programmes similaires ont vu le nombre d’accidents, de blessures et de dommages impliquant l’alcool diminuer significativement (entre 40 et 52%). Le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substance et l’Association pour la santé publique du Québec ont d’ailleurs publié récemment à ce sujet.
Comment justifier que nous restions l’exception canadienne alors que cela ruine la vie de centaines de Québécois chaque année ? Bien que ce soit ardu, les décideurs, dont vous êtes, peuvent immédiatement agir afin d’éviter de nouvelles tragédies. Si vous ne le faites pas, qui le fera ?
Au nom de toutes les victimes blessées ou tuées par la conduite avec capacités affaiblies par l’alcool et les drogues, et au nom de leur famille, nous vous demandons de sauver des vies ! Agissons ensemble pour éviter d’autres morts inutiles.
Antoine Bittar et Elizabeth Rivera, Parents de Jessica