De violents affrontements ont éclaté samedi entre manifestants et forces de l'ordre autour d'une réserve d'eau contestée en construction à Sainte-Soline, dans le centre ouest de la France, où des milliers de personnes se sont mobilisées malgré l'interdiction du rassemblement.
Une trentaine de gendarmes et manifestants ont été blessés selon les autorités locales, mais les organisateurs évoquent un bilan beaucoup plus lourd, avec une personne entre la vie et la mort, information non confirmée dans l'immédiat.
Au moins 6000 personnes, selon la préfecture, jusqu'à 30 000 selon les organisateurs - le collectif d'associations «Bassines non merci», le mouvement écologiste des Soulèvements de la Terre et le syndicat agricole proche de la gauche Confédération paysanne - ont convergé vers la bassine en chantier dans le but de «stopper» la construction de ces réservoirs d'eau destinés à l'agriculture.
«Au moins un millier» d'activistes violents, en partie venus de l'étranger, «prêts à en découdre avec les forces de l'ordre», participent au rassemblement, selon les autorités.
Ils ont trouvé face à eux plus de 3000 gendarmes et policiers mobilisés pour défendre le site.
À l'approche du chantier, aux allures de bastion médiéval avec son talus entouré par les forces de l'ordre, de violents affrontements ont éclaté rapidement, transformant l'endroit en scène de guerre, avec de fortes détonations et des véhicules en feu.
Les assaillants ont fait usage «de mortiers d'artifices, de chandelles romaines et de cocktails Molotov de forte contenance» parmi d'autres projectiles, selon la gendarmerie qui a riposté en tirant 4000 grenades de gaz lacrymogènes et de désencerclement, et en utilisant des LBD.

AFP
Au bout d'une heure, la foule refluait dans un épais nuage de fumée, tandis qu'intervenaient des forces de l'ordre sur des quads, a raconté à l'AFP Marine Tondelier, secrétaire nationale du parti écologiste EELV, présente sur les lieux.
Selon un bilan actualisé par les autorités, sept manifestants et 24 gendarmes ont été blessés, avec de chaque côté un blessé grave traité en urgence absolue et héliporté par les secours.
Mais les organisateurs du rassemblement font état, eux, de «pas moins de 200» manifestants blessés, dont dix hospitalisés et un dans le coma avec pronostic vital engagé, dénonçant une «violence criminelle» des forces de l'ordre.
L'information n'a pas été infirmée ou confirmée dans l'immédiat par la préfecture.
Des témoins interrogés par l'AFP et des observateurs de la Ligue des droits de l'Homme ont déploré par ailleurs que la prise en charge d'un blessé grave ait été retardée par les autorités; la préfecture locale a répondu que le dispositif prévoyait une escorte des secours par les gendarmes pour assurer leur sécurité.
«À Sainte-Soline, l'ultra gauche et l'extrême gauche sont d'une extrême violence contre nos gendarmes. Inqualifiable, insupportable», a réagi dans un tweet le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin.

AFP
La France vit depuis plusieurs semaines au rythme d'une large mobilisation contre la réforme des retraites avec une succession de manifestations «sauvages» émaillées de violence.
La majorité des manifestants sont restés pacifiques. Toutefois, interrogé par l'AFP, l'un d'entre eux, venu du nord de la France confesse «(n'avoir) aucun problème avec cette violence, même si je n'y prends pas part. Il y a de la violence partout en ce moment, à commencer par cette réforme des retraites (...) Je comprends que des gens aient la rage».
«Alors que le pays se soulève pour défendre les retraites, nous allons simultanément faire front pour défendre l'eau», avaient lancé les organisateurs vendredi.
Seize retenues, d'une capacité totale d'environ 6 millions de mètres cubes, doivent être construites, principalement dans le département des Deux-Sèvres (centre ouest), dans le cadre d'un projet porté par une coopérative de 450 agriculteurs avec le soutien de l'État.

AFP
Il vise à stocker en plein air de l'eau puisée dans les nappes superficielles en hiver, afin d'irriguer les cultures en été quand les précipitations se raréfient.
Ses partisans en font une condition de la survie des exploitations agricoles face à la menace de sécheresses récurrentes. Les opposants dénoncent, eux, un «accaparement» de l'eau par «l'agro-industrie» à l'heure du changement climatique.