Incroyable, cet accord canado-américain sur la fermeture du chemin Roxham.
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On comprend que plusieurs détails restent à définir. Là où, précisément, le Diable se cache...
Il semble que l'Entente sur les tiers pays sûrs de 2004 sera maintenant appliquée sur toute la frontière. À n'en point douter, le Québec, par sa géographie, demeurera une porte d'entrée importante pour les demandeurs d'asile.
Défi
La crise migratoire mondiale actuelle met au défi le modèle canadien en ces matières: notre gouvernement s'est longtemps contenté essentiellement de sélectionner ses réfugiés dans les camps, un peu partout dans le monde. Il en recevait relativement peu à ses frontières.
L'après-Roxham ne nous ramènera pas à cette ère «confortable». Les réfugiés continueront à affluer.
Nous avons connu certaines «vagues» dans le passé. Au Québec, lesdits «boat people», dans les années 1970, furent accueillis entre autres grâce à Jacques Couture, ministre de l'Immigration de René Lévesque. Il y eut aussi les Haïtiens, au début des années 1980. (Des humains, qui, en passant, grâce aux politiques mises en place à l'époque, ont pu devenir de fiers Québécois.)
Toutefois, comparativement à ce que d'autres pays ont eu à affronter, ces expériences représentent des vaguelettes.
Le cas allemand
L'Allemagne par exemple, en 2014 et en 2015 seulement, a reçu 1,2 million de demandes d’asile.
La République fédérale avait aussi connu un afflux similaire au début des années 1990, rappellent les auteurs Jennifer Elrick et Daniel Béland, dans un très intéressant texte de la revue Options politiques («Le chemin Roxham et les leçons de l’Allemagne», 15 mars).
Selon eux, le Canada pourrait s'inspirer de plusieurs aspects du système d'accueil des réfugiés mis en place dans la fédération allemande.
Notamment une «redistribution des réfugiés» entre les 16 Länders (équivalent des provinces) qui se fait «en fonction des recettes fiscales et de la population de chaque État». Ceux étant davantage «peuplés» et «puissants économiquement se voient attribuer proportionnellement» plus de demandeurs que ceux comptant «moins d’habitants et dont l’économie est plus modeste».
Une «clé»
Une formule de redistribution fut définie il y a des décennies, la Clé de Königstein (Königsteiner Schlüssel). Au micro de QUB jeudi, Daniel Béland, directeur de l'Institut d'études canadiennes de McGill, l'a comparée à celle de la péréquation canadienne, «en moins compliquée»!
Selon Béland, si un tel programme de répartition était instauré en notre Dominion, en fonction de principes apparentés, l'Alberta devrait recevoir davantage de demandeurs.
La technologie est aussi mise à contribution. Dès qu’un demandeur dépose une demande, peu importe où «un système électronique détermine automatiquement l’État qui traitera son dossier, et il y est immédiatement envoyé (aux frais du premier État où il est arrivé)».
Aucun système n'est parfait évidemment: nos chartes, telles qu'interprétées par les tribunaux, accepteraient-elles les restrictions à la liberté de circulation induites par ce type de système? Les impératifs linguistiques du Québec compliqueraient aussi les choses, très probablement.
Nul doute cependant qu'un examen attentif de ce qui se fait dans une des pays les plus populeux d'Europe serait profitable à plusieurs égards, dans l'après-Roxham qui s'ouvre.