La nouvelle commissaire par intérim aux conflits d’intérêts et à l’éthique se trouve... en apparence de conflit d’intérêts. Martine Richard, la belle-sœur du ministre des Affaires intergouvernementales, Dominic LeBlanc, ne peut convenablement superviser le gouvernement libéral et doit être remplacée, estiment les oppositions à Ottawa.
En tant qu’«agent indépendant du Parlement», la Commissaire est chargée de superviser les activités des fonctionnaires et des élus pour «prévenir» et «éviter» les conflits «entre leurs fonctions publiques et leurs intérêts privés».
Elle a le pouvoir d’enquêter et de blâmer.«La nomination d’un membre de la famille à ce poste est un exemple de conflit d’intérêts [...]», juge Michael Barrett, porte-parole en matière d’Éthique des conservateurs.
Le chef adjoint du NPD, Alexandre Boulerice, demande au gouvernement Trudeau de «réévaluer» la nomination de Mme Richard, alors que le bloquiste René Villemure dénonce «vigoureusement» cette nomination.
«C’est assez surprenant que les libéraux ne voient pas qu’à sa face même, ça pose un problème d’apparence de conflit d’intérêts», a déclaré en entrevue M. Boulerice.
«S’il y a bien une fonction qui se doit d’être exempte de toute apparence de conflit d’intérêts, c’est bien celle-là.
Les libéraux ne respectent de toute évidence pas ces standards avec ce choix et portent eux-mêmes ombrage à l’indépendance du poste», a-t-il dit.
Des «filtres» pour prévenir le coupDans un courriel, le Commissariat aux conflits d’intérêts et à l’éthique assure qu’un «filtre anti-conflits d’intérêts» a été mis en place entre Martine Richard et le ministre LeBlanc «dès son arrivée au Commissariat» en 2013 au poste d’avocate générale.
«Un filtre est mis en place lorsqu’un conflit d’intérêts potentiel est identifié. Contrairement à une récusation, un filtre est une mesure préventive visant à empêcher la personne de prendre connaissance d’une situation qui la placerait dans une situation de conflit potentiel», a fait savoir le Commissariat.
L’ancienne commissaire, Mary Dawson, maintenant à la retraite, a déclaré en entrevue que le «filtre» avait été instauré dès que le lien de parenté avec le ministre Leblanc a été connu.
Elle n’a pas voulu commenter davantage, mais a souligné les qualités de Mme Richard.Un ministre déjà épingléEn 2018, le ministre LeBlanc avait été épinglé par le commissaire à l’éthique en lien avec l’attribution d’un permis de pêche de plusieurs millions de dollars à une entreprise qui employait un cousin de sa femme.
«Lorsqu’il est au courant de cas où l’intérêt personnel d’un parent peut être favorisé par l’exercice d’un pouvoir officiel ou d’une fonction officielle, le titulaire de charge publique doit veiller à prendre les mesures qui s’imposent pour éviter tout conflit d’intérêts», avait indiqué l’ancien commissaire Mario Dion dans sa décision.
Talonné sur cette nomination mercredi, le leader parlement du gouvernement, Mark Holland, a rétorqué que Mme Richard est employée au Commissariat depuis une dizaine d’années et qu’elle avait été nommée par le gouvernement de Stephen Harper.
M. Holland a assuré que des «barrières éthiques» étaient en place pour éviter les conflits d’intérêts.