Le suspense est terminé : Ottawa donne le feu vert à l’acquisition de Shaw par Rogers, une entente évaluée à 20 milliards $ qui verra aussi Québecor prendre le contrôle de Freedom Mobile, la filiale de téléphonie mobile de Shaw, pour 2,85 milliards $.
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Le ministre de l’Innovation François-Philippe Champagne a finalement tranché, vendredi, en imposant une série de conditions aux parties, notamment que l’arrivée dans l’Ouest canadien de Vidéotron, propriété de Québecor, mène à une baisse des prix de 20 % sur ce marché.
«Si les Canadiens ne commencent pas à voir une réduction significative les prix dans un délai raisonnable à la suite de cette décision, je n’aurai d’autre choix que de solliciter d’autres pouvoirs législatifs et réglementaires afin de faire baisser les prix. Et j’insiste pour le dire, rien n’est exclu», a déclaré M. Champagne en point de presse matinal vendredi.
M. Champagne impose aussi à Québecor qu’il ne transfère pas ses licences pour aux moins dix ans, qu’il installe le réseau de 5G sur le territoire de Freedom Mobile dans un délai de deux ans, qu’il étende le service sans fil au Manitoba et qu’il offre 10 % de données supplémentaires en bonus temporaire aux clients actuels de Freedom.
Québecor s’est d’ailleurs engagé à payer des pénalités de 200 millions $ s’il n’arrivait pas à respecter les termes de l’entente, a déclaré le ministre. L’entreprise aurait aussi accepté de payer 150 millions $ pour moderniser le réseau existant de Freedom Mobile, qui dessert près de 2 millions de clients en Ontario, en Alberta et en Colombie-Britannique.
De son côté, Rogers s’est dit prêt à payer un milliard pour une série d’autres conditions, qui inclut notamment une obligation de débourser un milliard sur cinq ans pour étendre l’internet haute vitesse et la 5G dans des régions mal desservies.
Il n’a fallu qu’un peu plus d’une heure pour que les entreprises publient un communiqué conjoint annonçant leur intention d’aller de l’avant avec les transactions «proconcurrentielles» avant le 7 avril, soit vendredi prochain.
«Comme Vidéotron l’a fait dans le marché québécois, Freedom mènera une lutte féroce aux fournisseurs de services sans fil du Canada dans le but d'engendrer une baisse des prix au bénéfice des consommateurs», a déclaré Pierre Karl Péladeau, président et chef de la direction de Québecor.
Un long parcours
C’est la plus grande entente conclue dans le secteur des télécommunications de l’histoire du Canada, puisqu’elle implique la fusion des deux plus importants câblodistributeurs au pays et mène à la création d’un «quatrième joueur national» dans le marché canadien de la téléphonie mobile après Bell, Rogers et TELUS.
Le parcours était toutefois semé d’embûches.
D’abord annoncée en 2021, la fusion proposée de Rogers et de Shaw avait été acceptée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) pour le volet des services de radiodiffusion.
La transaction de départ incluait aussi l’acquisition de Freedom Mobile par Rogers, mais le transfert des licences avait été refusé par le ministre Champagne. C’est dans ce contexte que les deux parties prenantes se sont tournées vers Vidéotron.
Le Bureau de la concurrence, un organisme indépendant de surveillance du marché, s’est toutefois opposé au rachat, estimant qu’elle nuirait à la compétition et aux clients. La décision a été infirmée par le Tribunal de la concurrence, et la Cour d’appel fédéral a donné raison au Tribunal plutôt qu’au Bureau au mois de janvier dernier.
La décision du ministre Champagne est le point de final de cette saga.