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Zone tampon de Rouyn-Noranda: Glencore est en mode acquisition de terrain depuis l’automne

PHOTOS Émilie Parent-Bouchard/ AGENCE QMI.

Glencore, qui exploite la Fonderie Horne à Rouyn-Noranda, achète des propriétés de la zone tampon depuis l’automne dernier, a appris l’Agence QMI. Elle est maintenant propriétaire de 10 % des immeubles habités de cette zone.

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Deux résidentes du quartier Notre-Dame, voisines de la fonderie, ont appris par hasard que leur immeuble est une propriété de Glencore. C’est le cas d’Isabelle Courtemanche qui a eu la surprise en essayant de contacter son propriétaire pour des travaux dans son appartement. Elle a découvert qu’elle devait verser le loyer à un percepteur. C’est en écoutant les nouvelles qu’elle a compris qui était son nouveau propriétaire.

La Fonderie Horne fait les manchettes depuis plus d’un an en raison de ses émanations de métaux lourds, notamment d’arsenic, qui dépasse la norme québécoise.

Rappelons qu’à la mi-mars, quelque 200 familles de Rouyn-Noranda ont appris dans les médias leur déménagement futur. Québec a ensuite confirmé que la multinationale Glencore allait acquérir 82 immeubles situés dans le quartier. Québec a aussi promis d’investir pour réaliser ce déplacement et construire un nouveau quartier.

L’objectif est d’avoir une distance entre les activités de la Fonderie Horne et les résidents en établissant une «zone tampon» aux abords de l’usine.

«J’ai envie que mon garçon joue dans la neige blanche, pas noire, a confié Mme Courtemanche en entrevue, mardi. S’ils veulent démolir ici, c’est qu’il y a une raison.»

Or, l’Agence QMI a appris que depuis octobre, quatre immeubles de la zone sont devenus propriétés de Glencore.

Par ailleurs, l’entreprise a aussi acquis quatre autres immeubles en janvier 2019, soit quelques mois avant la publication de données indiquant que les concentrations d'arsenic étaient quatre fois plus élevées chez les enfants du quartier Notre-Dame que celles observées auprès d'un groupe témoin d'enfants non exposés à l'arsenic.

La multinationale est donc déjà propriétaire de 10 % des 79 immeubles habités de la zone tampon projetée, pour un total de 22 logements. Elle devra aussi négocier avec certains de ses employés, a confirmé l'entreprise le 16 mars dernier.

Voisine de Mme Courtemanche, Suzanne Meunier doit déménager pour la seconde fois à cause de la Fonderie Horne. L’immeuble où logeait la dame de 64 ans a été acquis lors de précédentes campagnes de rachat de propriétés.

«Les loyers qui répondent [à mes besoins] sont 800, 900 piastres. Je ne peux pas payer plus que 600 piastres. Tu me parles de ça et j’ai juste le goût de pleurer. S’il faut que je déménage, je vais déménager, mais avec mes conditions», a dit avec une larme à l’œil la prestataire de l’assurance-sociale.

Isabelle Courtemanche, tout comme sa voisine, s’inquiète de l’absence de détails pour la relocalisation et l’indemnisation des locataires.

Suspendre le programme de rachat

De son côté, la Ville de Rouyn-Noranda savait que la Fonderie procédait à des acquisitions dans le cadre d'un programme volontaire de rachat de propriétés, en vigueur depuis plusieurs années. Elle réclame toutefois la suspension de ce programme le temps que soit précisées les modalités de compensations des propriétaires et des locataires.

Par courriel, Glencore a précisé que les «maisons «qu’elle possède] déjà dans le périmètre de la zone tampon ont été achetées de gré-à-gré avec les propriétaires, après que ceux-ci [l’ait contactée] pour [lui] signifier vouloir vendre».

La municipalité confirme que ceux qui ont vendu leur résidence depuis le 16 mars auront droit aux compensations prévues à cet effet, contrairement aux propriétaires qui ont conclu des transactions avant cette date.

Selon la mairesse suppléante, Samuelle Ramsay-Houle, le processus de rachat doit être interrompu tant que «les règles ne seront pas très claires et publiques, surtout transparentes».

«On veut que l’ensemble des citoyens, des propriétaires soient au fait des mêmes informations», a-t-elle soutenu.

Un comité d’accompagnement sera lancé dans un horizon de «semaines plus que de mois», a précisé le conseiller municipal du quartier visé, Réal Beauchamp.

L’élu, qui a fait du porte-à-porte avec ses collègues depuis le 16 mars, laisse entendre que la Ville pourrait s’impliquer aussi dans la construction de logements.

De son côté, le directeur de santé publique de la région croit que toutes les parties devraient œuvrer ensemble pour limiter les risques de l’exposition des résidents aux métaux lourds.

«En 2023, bâtir une entreprise comme celle-là à côté d’un quartier résidentiel, ça ne se fait plus. Ce sont les pratiques historiques des anciennes villes industrielles», a insisté le Dr Stéphane Trépanier.

«Ce qui est très important, c’est de s’assurer que les avantages dépassent les inconvénients [...]», a ajouté le Dr Trépanier.

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