Un résident de Québec est outré de ne pas avoir été capable de se faire servir en français sur un vol d’Air Canada en partance de l’aéroport international Jean-Lesage et en direction de la Floride.
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Jean-Pierre Beaudoin, un homme d’affaires, est embarqué à bord du vol AC1688 le 21 mars dernier, en compagnie de son épouse. Ils avaient réservé des sièges en Classe affaires.
«Je m’assois et l’agente de bord principale vient me voir. Elle s’adresse à moi en anglais. Je lui dis: “Je parle français”. Elle me répond qu’elle ne parle pas français. Je lui répète que je veux être servi en français», a raconté M. Beaudoin.
Après quelques échanges, l’agente unilingue part chercher une collègue francophone pour qu’elle explique la situation en français à M. Beaudoin, qui a déjà très bien compris parce qu’il est bilingue.
En anglais ou rien
Face à l’insistance du voyageur, les deux femmes repartent discuter ensemble et reviennent quelques secondes plus tard.
«L’agente me dit en anglais: “Monsieur, c’est ma section. Vous avez le droit de quitter l’avion ou c’est moi qui vais vous servir.” L’autre me traduit ça. J’ai répété que je tenais à être servi en français. J’ai dit: “Tu parles français, toi? Je ne veux pas être servi en anglais”», a affirmé M. Beaudoin.
Selon lui, un homme est entré dans l’avion peu de temps après pour lui dire qu’il allait être servi par cette employée anglophone, sinon il devait quitter l’avion. M. Beaudoin ne peut pas dire s’il s’agissait d’un employé d’Air Canada ou d’un agent de sécurité de l’aéroport.
«Je bouillais trop en dedans. Je me disais “On est à Québec. Le vol origine de Québec.” C’est sûr que ce n’était pas un choix pour moi de quitter l’avion. L’employée unilingue a ajouté: “Vous prendrez le prochain avion avec une agente de bord francophone”», a-t-il affirmé.
Question de principe
Il a décidé de rester dans l’avion. Tout le service s’est déroulé en anglais pendant le vol, alors que lui répondait en français.
«Pour moi, c’est une question de principe», a dit M. Beaudoin, qui n’en revient toujours pas du traitement qu’il a reçu.
Il aurait apprécié que les autres passagers témoins de la scène l’appuient dans son insistance pour avoir un service en français, mais personne n’a parlé, a-t-il rapporté.
M. Beaudoin soutient qu’il a porté plainte auprès de l’Office québécois de la langue française dans les heures qui ont suivi le vol.
Il ne l’a pas fait auprès d’Air Canada, prétextant ne pas avoir confiance dans leur processus de traitement des plaintes.
«Je ne m’attends à rien. Je veux juste que les gens le sachent. J’essaie de dire au monde: “Réveillez-vous un peu”. C’est totalement inacceptable des choses comme ça. Ça ne se fait pas», a-t-il lancé.
Selon Air Canada, deux des trois agents de bord assignés à ce vol étaient en mesure de parler et comprendre le français.
«Donc, le service dans les deux langues officielles était disponible et offert. À cet égard, il est faux de prétendre que la seule solution ait été de lui demander de quitter l’appareil puisque les membres du personnel parlant français ont été en mesure et disponible de servir monsieur Beaudoin en français», a réagi la compagnie aérienne.
M. Beaudoin soutient de son côté qu'en aucun moment l'agent de bord francophone lui a proposé de le servir en français, même si le voyageur n'était pas assigné à sa section.
L’Office québécois de la langue française n'a pas encore répondu à nos demandes.
- Écoutez l'entrevue avec Maxime Laporte, président du Mouvement Québec Français à l’émission de Richard Martineau via QUB radio :
DES PLAINTES POUR MANQUEMENTS SUR LE FRANÇAIS
- Air Canada est assujettie à la Loi sur les langues officielles qui prescrit le maintien des obligations linguistiques du transporteur depuis sa privatisation en 1988.
- Chaque année, des plaintes sont portées contre le transporteur pour ses manquements en matière de services en français auprès de ses clients.
- La Cour fédérale du Canada a déjà accordé des réparations en ordonnant à Air Canada de payer des dommages et intérêts à des citoyens dont les droits avaient été enfreints.
- En 2017, Air Canada confirmait «être en mesure» d’assigner du personnel bilingue sur tous les vols exploités directement.
- La convention collective prévoit un nombre minimum d’employés bilingues sur tous les vols, selon le type d’appareil.
SOURCE : AIR CANADA
UN PROBLÈME QUI PERDURE CHEZ AIR CANADA
3 novembre 2021
Nouvellement nommé PDG d’Air Canada, Michael Rousseau prononce un discours presque exclusivement en anglais à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, suscitant l’ire de nombreux observateurs.
Dans une mêlée de presse suivant son allocution, M. Rousseau a dit avoir «toujours été capable de vivre à Montréal sans parler français» depuis son arrivée en 2007.
28 février 2022
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Il s’agit du plus grand nombre de plaintes reçues pour un seul événement dans l’histoire de l’organisation.
21 mars 2022
Affirmant suivre des cours de français intensifs tous les jours, le patron d’Air Canada baragouine des excuses dans un français très approximatif devant le Comité permanent des langues officielles.
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23 mars 2022
Les élus du Québec votent à l’unanimité pour soumettre les entreprises de compétence fédérale à la loi 101.
8 avril 2022
Dans un rapport de 17 pages, le commissaire aux langues officielles, Raymond Théberge, déclare après enquête que les plaintes sont fondées et qu’Air Canada n’a pas respecté la loi lors du discours de M. Rousseau.
— Jérémy Bernier, Le Journal de Québec