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Procès de Martin Lévesque: il faisait partie du corps de métier le plus à risque de développer un trouble de stress post-traumatique sévère

Martin Lévesque faisait partie du corps de métier militaire le plus à risque de développer un trouble de stress post-traumatique est venu exposer un psychiatre spécialisé en la matière au procès pour le meurtre de Patricia Sirois.

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Ingénieur de combat au sein des Forces armées canadiennes, Martin Lévesque s’est retrouvé en première ligne lors de ses déploiements en théâtre de guerre, notamment deux tours en Afghanistan. L'homme était retraité de l'armée depuis quatre ans au moment du meurtre de Patricia Sirois. Son ex-conjointe a raconté mardi les conséquences sur lui de la perte d’amis proches au combat, ajoutant d’ailleurs que Lévesque avait lui-même été blessé par une explosion. 

Photo fournie par le tribunal

Pour le psychiatre Mathieu Bilodeau, ces contacts avec la mort ne mentent pas.

«La proximité du combat, du danger, augmente le risque de stress post-traumatique», a exposé le médecin qui pratique à la Clinique TSO de Québec, spécialisée dans le traitement d’anciens militaires.

Le Dr Bilodeau n’a toutefois jamais évalué Martin Lévesque personnellement. La défense l’a fait entendre mercredi pour présenter les grandes lignes de ce mal qui afflige de nombreux anciens combattants.

Capture d'écran, TVA Nouvelles

Évoquant de façon sommaire les résultats d’une analyse menée par l’un de ses anciens collègues à la suite du retour de mission d’un groupe de militaire, le Dr Bilodeau a chiffré à plus de 50% le taux d’occurrence d’un trouble de stress post-traumatique chez les ingénieurs de combat au sein de l’échantillon. 

Hypervigilance et dissociation

Cauchemars, flashbacks, amnésie, perte d’intérêt ou détachement face aux proches, hyperéveil et hypervigilance, les symptômes du syndrome de stress post-traumatique présentés par le Dr Bilodeau sont nombreux.

L’hypervigilance devient toutefois le symptôme le plus incapacitant pour la clientèle a expliqué le spécialiste, précisant que les patients vont avoir tendance à s’isoler pour réduire les contacts avec ce qu’ils perçoivent comme des dangers potentiels.

Photo fournie par le tribunal

L’avocat de la défense, Me Pierre Gagnon, s’est également intéressé à la dissociation que peuvent présenter certains patients. Rappelons que son client, Martin Lévesque, a reconnu avoir tué sa voisine Patricia Sirois de six coups de feu le 10 septembre 2021, mais plaide la non-responsabilité criminelle pour troubles mentaux. Il affirmait en interrogatoire après le meurtre craindre en raison de tentative de vols et d'incendie criminel chez lui dans les semaines précédentes.

«La croissance de l’hypervigilance chez quelqu’un qui est sujet à dissocier, est-ce que cette hypervigilance-là rend plus probable un épisode de dissociation», a demandé Me Gagnon au témoin.

«C’est ce qu’on observe en clinique chez notre clientèle», a admis le Dr Bilodeau. «Plus ils sont convaincus qu’il y a de la menace, plus ils vont avoir de la tendance à dissocier.»

Photo fournie par le tribunal

Et le rôle de l’alcool dans le portrait?

«L’alcool est l’un des facteurs qui fait dissocier le plus», a reconnu le psychiatre. 

Il a été établi en preuve que Martin Lévesque avait consommé de l’alcool le jour du drame. Certains témoins ont établi que l’homme et sa conjointe semblaient tous deux intoxiqués dans les heures précédant la mort de Patricia Sirois.

Patricia Sirois a été tuée par balle.

Photo courtoisie

Patricia Sirois a été tuée par balle.

«Phénomène très complexe»

Pour bien expliquer la dissociation au jury, le Dr Bilodeau l’a détaillé en deux catégories.

Celle présentant des «symptômes positifs» constitue des ajouts à la réalité perçus par le patient. Il peut s’agir de flashbacks liés à des missions qui font ressentir des choses qui ne sont pas là et qui viennent fausser la perception. Un ex-militaire peut par exemple imaginer voir le sable désertique ou sentir le chaud soleil sur sa peau même s’il fait -5 degrés et ainsi se replonger dans les émotions de stress et d’angoisse d’une mission.

La dissociation à symptômes négatifs est quant à elle l’équivalant d’un interrupteur qui se ferme. 

«C’est comme le breaker qui saute. On parle d’amnésie, de déréalisation, de dépersonnalisation», a expliqué le médecin.

Et un individu qui dissocie peut-il enregistrer et comprendre ce qui se passe autour? En garde-t-il des souvenirs? 

Photo fournie par le tribunal

C’est là le nœud du débat et le Dr Bilodeau a indiqué qu’il y a autant de possibilités qu’il y a de cas de syndrome de stress post-traumatiques.

«On voit un peu de tout. Des gens un peu ou beaucoup dissociés. Avec ou sans amnésie. Avec symptômes positifs ou négatifs. C’est un phénomène très complexe et on en voit à toutes les sauces.»

Le témoignage du médecin se poursuivra en après-midi mercredi, suivi du contre-interrogatoire par la poursuite. L’accusé, Martin Lévesque, doit ensuite prendre la barre pour raconter son histoire. 

La défense présentera ensuite le témoignage du psychiatre Gilles Chamberland, qui a évalué la condition psychologique de Martin Lévesque.

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