Un juge estime que l'État a « lamentablement échoué » dans la gestion d'un homme aux prises avec des problèmes de santé mentale et de consommation de drogue, qui a fini par tuer sa conjointe lors d'un délire provoqué par le crack.
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«Malgré toute la violence de cette journée fatidique, la peine proposée n’est pas contraire à l’ordre public et tient en compte les éléments de nature de santé mentale», a lancé en matinée le juge Sylvain Lépine, avant d'entériner la suggestion commune d'une peine de huit ans de prison à Pascal Arseneault, au palais de justice de Saint-Jérôme.
«Il faut prendre en considération des facteurs liés à une problématique grandissante dans notre société», a-t-il poursuivi.
En mars dernier, l’homme de 50 ans a reconnu qu’il était l’auteur de l'homicide involontaire de sa conjointe Louise Avon, 64 ans, survenu à Sainte-Agathe-des-Monts, le 31 mars 2022.
Dans la neige
Ce soir-là, ce dernier avait consommé une importante quantité de crack, lui qui était en rechute depuis quelques mois, après avoir été abstinent pendant 12 ans.
Il a poignardé sa conjointe à neuf reprises, avant de mettre le feu à leur domicile, et d’en sortir. Les policiers l’ont trouvé couché dans la neige, armé d’un couteau, et en possession de 16 g de crack.
Arseneault tenait des propos délirants, disant être un ninja, et croyant que sa conjointe des 12 dernières années était un robot.
Dans les Laurentides, ce couple était connu comme étant propriétaire de la compagnie d’aménagement paysager Les Pas Verts du Nord.
Rien pour éviter le pire
Durant les procédures judiciaires, Arseneault a clamé avoir été ridiculisé par les autorités, qui n’auraient pas pris ses problèmes de consommation et de santé mentale au sérieux.
«Les évènements tragiques qui ont mené au décès de la victime démontrent une fois de plus, les ravages qu’occasionne la consommation de stupéfiants, s’est attristé le juge Lépine. Toute la société paie le prix pour ces productions et trafics de drogues avec des conséquences dramatiques. Les dernières années, avec la pandémie, ont été difficiles pour tous les citoyens.»
Le magistrat a notamment reconnu que la réduction des effectifs a eu un « impact important » dans les services publics, tant dans la santé, l’éducation, que la justice.
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12 interventions
Il a cependant déploré qu’il était « franchement incompréhensible et même choquant» qu’aucune action concrète n’eût été prise pour éviter le pire, dans cette affaire.
«L’absence d’un programme cohérent en matière de santé mentale et d’interventions policières réfléchies menaces la sécurité du public. Une prise en charge de l’accusé aurait dû être mise en actions pour éviter un tel drame», a-t-il statué.
En effet, pas moins de 12 interventions policières avaient été nécessaires en moins de six mois pour gérer les délires toxiques d’Arseneault.
«Encore plus choquant, quelques jours avant l’homicide le 29 mars 2022, l’accusé est arrêté chez lui en pleine crise et en délire et amené à l’hôpital. Il sera libéré six heures plus tard», a déploré le juge.
Ce dernier a argué que « l’absence de coordination entre les interactions des policiers et le système de santé ont fait en sorte que l’État a lamentablement échoué dans son rôle de protection du public».
Il a conclu qu’aucune peine d’emprisonnement ne pourra combler la perte « d’une personne aussi aimable que Madame Louise Avon ».