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France: début du procès de l'ex-petit ami d'une adolescente poignardée et brûlée vive

«Quatorze coups de couteau!»: la violence du meurtre de Shaïna, 15 ans, poignardée et brûlée vive dans le nord de la France en 2019, a fait monter la tension lundi au procès de son ex-petit ami, jugé à huis clos pour assassinat, qui continue de clamer son innocence.

«Quatorze coups de couteau! Et puis il allume le feu, ça a fait boum!», s'est emporté, tremblant de colère, le père de Shaïna, lors d'une pause de l'audience, après avoir entendu des expertises médicales au premier jour du procès devant la cour d'assises des mineurs de l'Oise, à Beauvais.

«Et dès qu'il voit un témoin clé, il baisse la tête, il ose pas regarder», a-t-il lancé contre l'accusé, qui encourt la perpétuité si l'excuse de minorité est levée.

C'est «quelqu'un de froid, qui n'a aucun sentiment», a aussi fustigé la mère.

Âgé de 17 ans à l'époque, le jeune homme, accusé d'avoir attiré Shaïna, probablement enceinte de lui, dans un cabanon pour la tuer puis brûler son corps, est jugé jusqu'à vendredi.

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«Il conteste les faits, hurle son innocence», a déclaré son avocat, Me Adel Fares.

Mince, visage juvénile et cheveux noués en chignon, l'accusé, soutenu par ses parents, fait face dans la salle à une dizaine de proches de Shaïna.

Ce procès survient alors que le nombre de féminicides a augmenté de 20% en France en 2021 par rapport à l'année précédente, avec 122 femmes tuées par leur conjoint ou ex-conjoint, selon le ministère de l'Intérieur.

À Beauvais, la cour doit notamment entendre un ami à qui l'accusé aurait avoué le crime, «principal témoin à charge» selon l'avocate de la famille, Me Negar Haeri.

Un médecin devait également évoquer des blessures constatées sur l'accusé après les faits, attribué par lui à un frottement ou à de l'eczéma, alors que, pour ce légiste, elles évoquent des brûlures.

À l'appel du frère aîné de la victime, Yasin Hansye, quelques dizaines de personnes s'étaient rassemblées en soutien à la famille devant le tribunal.

«Nous sommes là pour que justice soit rendue à ma sœur», a affirmé Yasin Hansye.

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Guidés par la rumeur

Le 27 octobre 2019, le corps de l'adolescente est découvert presque entièrement calciné par les policiers, guidés par une rumeur.

Les expertises médico-légales révèleront de «multiples plaies» à l'arme blanche, mais aussi qu'elle respirait encore au début du feu.

L'avant-veille, elle était sortie après un dîner familial. Dans son sac à main, ses proches retrouvent un test de grossesse positif.

Selon diverses expertises, l'adolescente, qui avait subi une IVG quelques mois plus tôt, entamait très probablement une nouvelle grossesse. D'après l'enquête, elle attribuait la paternité à l'accusé, avec qui elle entretenait une liaison.

Deux appels anonymes, puis le témoignage de l'ami de l'accusé orientent rapidement l'enquête. Le jeune homme raconte que le mis en cause lui a confié la nuit des faits avoir donné rendez-vous à Shaïna pour la tuer.

Ce témoin livre des détails connus des seuls enquêteurs. Shaïna refusait d'avorter, révèle-t-il encore.

Des éléments de téléphonie incriminent aussi l'accusé, dont le portable, comme celui de Shaïna, a borné près du cabanon peu avant les faits.

«Long calvaire»

Un codétenu l'aurait entendu «dire fièrement» qu'il avait «tué sa copine, qui était +une pute+, qu'il avait "mise enceinte"», voulant éviter que sa famille l'apprenne. En prison, il disait «préférer prendre 30 ans qu'être le père d'un bâtard», selon un autre détenu.

Le crime pourrait être «une tentative désespérée» de préserver son image, dans un contexte «d'interdit culturel et religieux» lié à la sexualité, a estimé un expert psychologue.

Deux ans plus tôt, Shaïna avait été victime d'agressions sexuelles, pour lesquelles quatre autres jeunes de sa cité ont été condamnés jeudi en appel à des peines allant de six mois à deux ans de prison avec sursis.

Pour Me Haeri, sa mort «est le point culminant d'un long calvaire», enclenché par ces agressions filmées.

Shaïna a été traitée «comme une chose, avec qui on couche, mais qu'on peut supprimer», déplore l'avocate.

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