Troublée par la promotion controversée de deux anciens gestionnaires de l’école secondaire Saint-Laurent, la députée libérale Marwah Rizqy demande au ministre Drainville d’intervenir.
• À lire aussi - Agressions sexuelles: le comportement d’entraîneurs de basketball enduré dans le silence
• À lire aussi: École Saint-Laurent: la «dignité» de plusieurs élèves compromise
Le nouveau directeur général adjoint du Centre de services scolaire de Saint-Hyacinthe est Patrice Brisebois, révélait La Presse ce matin.
De 2013 à 2020, il était le directeur de l’école Saint-Laurent, où trois employés qui travaillaient auprès de jeunes joueuses de basketball font aujourd’hui face à des accusations d’agressions sexuelles ou d’exploitation sexuelle.
Le directeur du Centre de services scolaire Marguerite-Bourgeoys, Dominic Bertrand, vient également d'être nommé conseiller stratégique au ministère de l’Éducation.
Une enquête administrative du ministère de l’Éducation a d’ailleurs révélé que «plusieurs indicateurs concernant des comportements inappropriés ont été accumulés au fil des ans, sans faire l’objet d’une intervention adéquate, ce qui a permis d’instaurer une culture néfaste au sein d’un programme de basketball».
En point de presse, ce matin, à l’Assemblée nationale, la députée de Saint-Laurent a livré un vibrant plaidoyer pour qu’une firme externe produise une enquête indépendante et que ces gestionnaires soient suspendus durant le processus.
«Il y a présentement deux victimes. Il y a un procès au niveau criminel. J'avais demandé à l'époque que les directeurs d'école impliqués ainsi que le DG impliqué dans cette histoire soient suspendus le temps de l'enquête. Et j'avais aussi demandé qu'une firme spécialisée soit mandatée», a-t-elle mentionné.
«Ici, la firme spécialisée, pour moi, ce n'est pas le ministère de l'Éducation. En tout respect, ça ne peut pas être un fonctionnaire ici, de Québec, qui n'a pas une expertise en matière d'agression sexuelle, de harcèlement en milieu de travail, qui peut faire ce type d'enquête.»
La victime A dans ce dossier s’est d’ailleurs confiée à Mme Rizqy.
Avec son autorisation, la députée a lu un message qu’elle lui a envoyé.
«En tant que victime d'agression sexuelle perpétrée par des employés de l'école et des entraîneurs, je suis profondément bouleversée par la promotion de Dominique Bertrand et de Patrice Brisebois. Dominique Bertrand a été témoin de comportements dégradants lors des tournois de basketball. Il est resté passif. Le rapport d'enquête, qui n'est pas indépendant, indique néanmoins que la dignité des élèves a été compromise. Or, à ce jour, personne n'a été tenu responsable ou imputable. Je reçois ces nominations comme une gifle en plein visage. Si le gouvernement se soucie réellement des élèves de victimes d'agression sexuelle, qu'il déclenche une enquête indépendante. Des victimes méritent justice. Il est temps que des mesures soient prises pour garantir que de tels actes ne se reproduisent plus jamais dans nos écoles» - Victime A
L’élue de Saint-Laurent interpelle directement le ministre Bernard Drainville.
«C'est le gouvernement, le ministère de l'Éducation, qui doit mener une véritable enquête pour aller au fond des choses. Parce qu'il y a trop de points d'interrogation», a-t-elle réitéré.
«J'espère que M. Drainville, aujourd'hui, va comprendre la voix des victimes, puis de se dire: il faut aller au fond des choses de façon sérieuse. Ça serait peut-être le temps aussi qu'au Québec il y ait des gens qui soient un peu plus imputables. Les actions comptent, mais les inactions comptent autant.»
Drainville reste muet
Le ministre a toutefois refusé de répondre aux questions de Mme Rizqy, plaidant qu’il y a un processus judiciaire qui est en cours.
«Nous ne ferons donc aucun commentaire», a-t-il dit, refusant de dire s’il a respecté les recommandations du rapport et dépêcher une firme indépendante.
Un argument qui n’a pas plu à la députée libérale.
«L’enquête criminelle vise les agresseurs, alors que l’enquête administrative vise les cadres auxquels les enseignants se rapportent, auxquels les parents se rapportent et auxquels des élèves mineurs se sont rapportés et qui disent que rien n’a été fait. Alors, il faut distinguer le droit criminel et le droit administratif et civil», a-t-elle pesté.