Comme bien d'autres, j'étais profondément sceptique, en 2022, en voyant Nathalie Roy succéder à François Paradis à la présidence de l'Assemblée nationale.
Un collègue reporter avait utilisé l'expression «partisanerie extrême» pour désigner son travail parlementaire dans l'opposition; mais aussi comme ministre de la Culture.
Septembre 2019: François Legault lui retire le dossier crucial de la langue française, moins d'un an après le lui avoir confié.
Aux yeux des partis d'opposition, Roy était identifiée comme un maillon faible: «Elles ont tout fait pour la démolir, notamment la libérale Isabelle Melançon», m'écrit une ancienne élue, qui se rappelle aussi d'une vidéo où la QSiste Catherine Dorion la dépeignait comme «l’incompétente en chef».
- Écoutez l'analyse d'Antoine Robitaille dans le balado de Benoit Dutrizac à QUB radio :
Madame «vivre-ensemble»
Mais comme présidente, Nathalie Roy s'est transfigurée. D'une piñata détestable qui répond, stridente, hautaine et théâtrale, le doigt accusateur, elle est devenue... «madame “vivre-ensemble”», maîtresse du jeu efficace et estimée.
«Ça va très bien depuis qu’elle est présidente. Comparativement à son prédécesseur», m'écrit un élu du gouvernement.
Le libéral Marc Tanguay, chef de l'opposition officielle, vantait hier son travail, au dernier jour de la session: «Vous avez toute notre confiance, et la façon dont vous menez nos travaux nous permet, nous, d'être efficaces, et ça, c'est tout à votre mérite.»
Au PQ, après sa décision de décembre qui avait compliqué l'abolition du serment au roi, «on la détestait! Mais là, vraiment, ça va. Elle fait bien ça».
- Écoutez l'analyse de Rémi Nadeau au balado d'Antoine Robitaille à QUB radio :
Vraie nature
Mercredi, face à moi, dans les locaux princiers du cabinet de la présidence, Nathalie Roy se montre évidemment ravie de ces échos favorables.
Quel travail a-t-elle opéré sur elle pour passer de la vilaine partisane à la bonne présidente? «Aucun!» réplique-t-elle, en soulignant que la «neutralité» est désormais son objectif cardinal. «Je ne suis plus dans la chicane. C’est ma vraie nature que vous voyez. Une nature conciliante!»
Une amie reporter ajoute ceci: «C'est un rôle parfait pour elle, puisqu'il impose de la prestance, voire une attitude théâtrale, mais aussi une capacité à trancher.»
Le 1er juin, elle fit trembler les vieux murs bleus de l'«assnat» avec un «À L'ORDRE» sonore. Le calme est instantanément revenu. «Ç’a été efficace, non?» sourit Roy en ajoutant: «À utiliser avec parcimonie!»
Patrimoine
Ancienne ministre de la Culture, Nathalie Roy se dit habitée d'une «sensibilité totale» au patrimoine. Elle m'accueille en me faisant visiter ses locaux avec passion, s'arrêtant à chaque meuble patrimonial (fauteuils, horloge, bureaux), expliquant sa provenance.
Cette même sensibilité nous a peut-être permis d'éviter le pire, dans le long processus de réfection et de restauration du Salon bleu qui s'amorce, et qui devrait se terminer en 2026.
Elle n'a toutefois pas pu empêcher une certaine dénaturation du Salon bleu, puisqu'on lui disposera les sièges en fer à cheval et non plus strictement face à face, à la britannique.
Au moins, on a pu conserver un «maximum de pupitres patrimoniaux», comme disait un communiqué annonçant les travaux, hier. Une «sensibilité totale» aurait imposé de les conserver en totalité, non?