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Montréal ne fait rien pour sauver un bâtiment qui menace de s'effondrer

Ironiquement, Valérie Plante a récemment promis de punir les propriétaires négligents

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L'incinérateur Dickson.

Martin Chevalier / JdeM

L'incinérateur Dickson.

Montréal n’a rien fait depuis 30 ans pour sauver un bâtiment patrimonial qui menace de s’effondrer, alors que l’administration Plante se targue de serrer la vis aux propriétaires à qui elle reproche le même laxisme.  

Les rapports d’inspection des trois dernières décennies brossent un portrait pitoyable de l’état de l’incinérateur Dickson, reconnu depuis 2004 par la Ville comme ayant une valeur patrimoniale intéressante.

L'intérieur de l'édicule de l'incinérateur montre également d'importants signes de dégradation.

Rapport de la firme NCK commandé par la Ville - 2019

L'intérieur de l'édicule de l'incinérateur montre également d'importants signes de dégradation.

Ironiquement, l’administration de la mairesse Valérie Plante a déposé en mai dernier un projet de règlement qui prévoit des «amendes salées» pouvant aller jusqu’à 250 000$ aux propriétaires de bâtiments patrimoniaux mal entretenus.

«Le cadre bâti et le patrimoine définissent l’identité montréalaise. Pour mieux protéger nos bâtiments et nos milieux de vie, nous agissons une fois de plus pour responsabiliser les propriétaires d’immeubles vacants», se vantait alors Valérie Plante sur Twitter. 

Déjà en 2009, la façade des briques se détachait en raison de l'infiltration d'eau.

Rapport de la firme TechChem commandé par la Ville - 2009

Déjà en 2009, la façade des briques se détachait en raison de l'infiltration d'eau.

Selon Dinu Bumbaru, porte-parole d’Héritage Montréal, il existe effectivement un certain décalage entre le discours de la Ville et les actions qu’elle entreprend pour ses bâtiments. 

«Ça montre une double personnalité. C’est de l’incohérence. Effectivement, il faudrait que la Ville reconnaisse qu’elle est également [propriétaire] de patrimoine.» 

Des enjeux depuis 30 ans

Déjà, en 1992, un rapport d’inspection commandé par la Ville indiquait qu’une cheminée de l’incinérateur Dickson, désaffecté depuis 1978, montrait d’importants signes de détresse. 

«La cheminée démontre des défectuosités majeures, lesquelles devront être modifiées afin d'assurer la sécurité du personnel et la protection des bâtiments.» - Rapport de 1992 par Zedco. 

Des analyses réalisées en 2009, en 2015 et en 2019 ont ensuite confirmé que la situation du bâtiment construit dans les années 50 allait en se détériorant.

«L’effondrement complet ou partiel des cheminées [pourrait survenir] suite à une frappe de la foudre.» - Rapport de 2009 par Tech-Chem. 

À tel point qu’une secousse sismique d’importance ou l’effet de la foudre pourrait mener à l’effondrement des cheminées, notent certains des rapports. 

«Ça veut dire que tu as plusieurs administrations qui ont pelleté ça dans la cour de la suivante. En repoussant le problème, ce n’est pas comme ça qu’il va disparaître. Au contraire, il empire», déplore M. Bumbaru. 

«Il faut considérer que les effets d’un séisme, en termes de fissuration [...], pourront conduire à un effondrement.» - Rapport de 2019 par NCK. 
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Manque d’investissements

Ces propos trouvent écho dans le plus récent rapport de la vérificatrice générale de Montréal, Michèle Galipeau. Elle déplorait, en mai dernier, le fait que la Ville de Montréal était incapable de bien entretenir ses bâtiments patrimoniaux, notamment en raison d’un manque d’investissements.  

La Ville se dit maintenant «préoccupée» par l’état actuel des cheminées de l’incinérateur, notamment quant aux risques d’effondrement. 

«La toiture est tellement détériorée que de la végétation y pousse, dont un arbre.» - Analyse de 2015 par Lafontaine et Soucy Architectes 

Mais du même souffle, elle reconnaît n’avoir entrepris aucuns travaux depuis 30 ans pour assurer l’intégrité structurale des cheminées ou pour réparer le paratonnerre. 

«Toutefois, un périmètre de sécurité a été mis en place», se défend-elle. 

Projet d’écocentre

Malgré l’état lamentable du bâtiment, la Ville projette d’implanter un écocentre sur le site de l’incinérateur, a appris notre Bureau d’enquête. Toutefois, aucun scénario ou échéancier n’a encore été établi pour ce projet.

Les fenêtres de l'édicule de l'incinérateur sont lourdement endommagées.

Courtoisie Régis Côté et associés, 2014.

Les fenêtres de l'édicule de l'incinérateur sont lourdement endommagées.

À cet égard, Montréal a octroyé un contrat en novembre dernier à la firme NCK visant à brosser le portrait des travaux urgents à effectuer et à identifier les options de restauration possible, en vue de l’implantation de l’écocentre. En 2019, la restauration du bâtiment avait été évaluée à 1,1 million $. 

Mais comble de malheur, des enjeux de disponibilité avec la firme forcent désormais la Ville à réaliser l’analyse à l’interne, laquelle n’avait toujours pas été effectuée le mois dernier. 

Malgré les défis, Héritage Montréal voit d’un bon œil ce projet de revitalisation. 

«Dans d’autres villes, un bâtiment qui était vu comme une hypothèque est aujourd’hui est devenu un symbole heureux», observe M. Bumbaru. 

-Avec la collaboration de Dominique Cambron-Goulet

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